C’était il y a un peu plus de 10 ans.
Le pays des Lumières et des Droits de l’homme se retrouvait terrorisé. L’esprit Charlie était frappé au cœur, avec tout ce qu’il représente pour notre si précieux et envié “art de vivre” à la française : la liberté d’expression, la défense de l’ironie et de la critique des dogmes, qu’ils soient religieux, politiques ou sociétaux.
Depuis l’attaque tragique du 7 janvier 2015, qui a coûté la vie à plusieurs membres de la rédaction du célèbre journal satirique, il est légitime de s’interroger : que reste-t-il de cet esprit Charlie qui a su provoquer, parfois déranger, mais tout en s’efforçant d’éveiller les consciences ?
Plus grand chose visiblement, puisque stigmatisés par l’assassinat de Samuel Paty, bon nombre d’enseignants en arrivent à s’emmurer mentalement, histoire de ne pas avoir d’ennuis. Il ne faut surtout pas faire de vagues…
On peut toutefois se réjouir, à en constater les nombreuses manifestations de soutien de mardi dernier, que l’esprit Charlie n’est pas mort avec ses caricaturistes.
Il semble en effet avoir perduré dans le cœur et l’esprit de tous ceux qui défendent la liberté d’expression et de conscience. Indispensable dignité, sorte d’éthique humaine voire humaniste, dans notre époque où les discours s’extrémisent et où la polarisation politique est de plus en plus marquée (bien que l’on tente de nous faire croire le contraire).
C’est en ce sens que l’esprit Charlie incarne une forme de résistance intellectuelle, un refus de se soumettre aux idéologies dominantes et une volonté de questionner notre quotidien.
L’esprit Charlie, c’est aussi et surtout un appel à l’unité face à la haine et à l’intolérance. Dans un monde où les fractures se creusent, il est plus que jamais nécessaire de défendre la pluralité des voix et des opinions. C’est pourquoi la caricature, en tant qu’art et moyen d’expression, doit continuer à jouer son rôle de miroir déformant, sinon cynique, mais révélateur de notre société.
Ne cessons jamais le combat pour la liberté d’informer, de s’informer, de s’exprimer, valeurs fondamentales de notre République et de notre démocratie. Même si, personnellement, je n’ai pas toujours trouvé de très bon goût certaines de leurs couvertures, il n’appartient à personne de décider, juger ou réprimer le libre arbitre de quiconque.
Si le contenu d’un journal ne me convient pas, il m’appartient seulement de ne pas le lire…
Comme le cite le célèbre adage : « Je désapprouve ce que vous dites, mais je défendrai jusqu’à la mort votre droit de le dire ». C’est pourquoi, chacun d’entre nous devrait être et demeurer invariablement Charlie, qui plus est contre vents et marées. A l’image de l’inquiétante banalisation de l’obscurantisme et de la bien-pensance à sens unique, observée aujourd’hui dans notre Hexagone…