Jura. Voitures électriques dans le département : un bilan 2024 contrasté et des perspectives 2025 sous pression

Après une année 2024 marquée par l’arrivée de nouveaux modèles et la fluctuation des aides publiques, le marché des voitures électriques dans le Jura connaît une évolution en demi-teinte. Les concessionnaires locaux, qu’ils représentent Opel, Fiat ou encore Renault, partagent leur bilan 2024 et leurs perspectives pour 2025.

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Borne de recharge
Borne de recharge

Sur l’ensemble du département, l’année 2024 a permis de consolider la place des véhicules électriques. A l’échelle nationale, ces modèles ont représenté 17,3 % des immatriculations neuves au premier semestre, illustrant une progression significative. Cette croissance a été en grande partie portée par des dispositifs comme le leasing social. Attractif grâce à des loyers mensuels dès 50 €, ce programme a connu un tel succès qu’il a dépassé les prévisions budgétaires : initialement doté de 50 millions d’€, il a consommé 650 millions d’€ en moins de deux mois.

Marc Pagnier, du garage Opel (univers Stellantis) à Dole, résume : « Le dispositif du leasing social, au départ, était une bonne chose. Mais le succès a été tel, qu’en l’espace de deux mois, les pouvoirs publics se sont fait dépasser. » Chez Opel, les ventes d’électriques ont atteint 15 % des véhicules neufs en 2024, un chiffre encourageant.

Du côté de Fiat, l’année 2024 a été marquée par une stratégie audacieuse mais révélatrice des défis du marché. Le groupe Stellantis avait initialement choisi de miser exclusivement sur les véhicules électriques pour certains modèles emblématiques, comme la Fiat 500 et la Fiat 600. Jean-Philippe Rousset, concessionnaire Fiat à Lons-le-Saunier, raconte : « En novembre 2023, Fiat nous a annoncé qu’ils arrêtaient les moteurs thermiques. Il n’y avait plus que l’électrique. Pendant plusieurs mois, nous avons livré des Fiat 500 électriques, jusqu’à 100 % de nos commandes certains mois. » Cependant, face à la stagnation des ventes, Stellantis a fait marche arrière, réintroduisant des motorisations thermiques et hybrides dans sa gamme. Malgré cela, l’année 2024 reste marquée par des résultats encourageants pour Jean-Philippe Rousset : « Sur 250 Fiat neuves vendues, 75 % étaient des électriques, dont une très grande majorité (90 %) en location longue durée. »

Chez Renault, le groupe Deffeuille à Lons-le-Saunier a également profité de la dynamique croissante des véhicules électriques en 2024. « Sur environ 2 000 Renault neuves vendues dans le Jura, 12 % étaient électriques », indique Vincent Deffeuille. La sortie de la Renault 5 électrique a marqué un tournant, avec un véritable pic de ventes au niveau national. En novembre, ce modèle emblématique a enregistré 3 303 unités vendues en un mois, devançant des références comme la Tesla Model Y.

Infrastructures et autonomie : des freins persistants

Le Jura, comme de nombreux départements principalement ruraux, fait face à des retards dans le déploiement des bornes de recharge. Vincent Deffeuille (Renault) souligne : « Celui qui compte sur les bornes pour se recharger en ville, c’est un peu compliqué dans le Jura. »

Sur le plan de l’autonomie, les véhicules continuent de progresser. Des modèles comme la Renault Scenic affichent jusqu’à 550 km réels, un chiffre rassurant pour les trajets longs. Toutefois, d’autres, comme la Fiat 500 électrique restent limités à 300 km, freinant certains usages.

Un autre enjeu majeur concerne le marché de l’occasion. Les concessionnaires anticipent une saturation du marché d’ici trois ans, avec le retour des flottes en fin de location. Jean-Philippe Rousset (Fiat) prévient : « Dans 3 ans, on reprendra des flottes entières d’électriques d’occasion. Si la technologie a évolué entre-temps, leur valeur sera compliquée à tenir. »

2025 : maintenir la dynamique malgré des aides réduites

L’année 2025 s’annonce plus compliquée, sous l’effet d’un durcissement réglementaire et d’une diminution des aides publiques. La réglementation européenne CAFE impose une réduction de 15 % des émissions moyennes de CO2 des véhicules neufs par rapport à 2021, ce qui suppose une part de marché des électriques de 22 à 25 %.

Marc Pagnier (Opel) prévient : « C’est un objectif ambitieux pour le groupe Stellantis. Pour le réussir, il faut des moyens, des offres adaptées, et une clientèle au rendez-vous. » De plus, les aides publiques seront réduites en 2025. Le bonus écologique passera à 2 000 € pour la majorité des ménages, la prime à la conversion disparaîtra, et le malus écologique triplera par rapport à 2023, générant des recettes estimées à 2,21 milliards d’€. Ce contexte pourrait freiner les intentions d’achat. Jean-Philippe Rousset (Fiat) anticipe : « Les concessionnaires Fiat annoncent une année plutôt compliquée, avec une baisse de -30 % des ventes de véhicules neufs. »

Malgré ces défis, 2025 marquera l’arrivée de nouveaux modèles prometteurs :

  • Chez Opel : le Frontera électrique et hybride au premier semestre 2025.
  • Chez Fiat : la Grande Panda électrique (300 km réels), annoncée à 24 900 €.
  • Chez Renault : la Renault 4 électrique, qui rejoindra la Renault 5 et la Mégane E-Tech.

Avec la volonté européenne d’atteindre une neutralité carbone dans le secteur automobile, les constructeurs s’engagent avec un objectif ambitieux : d’ici 2035, 100 % des véhicules produits devront être électriques ou à très faibles émissions, ce qui redessine entièrement les contours du marché. Marc Pagnier (Opel) conclut :
« Les industriels se sont inscrits depuis longtemps dans la démarche électrique. Maintenant, il faut maintenir un cadre clair pour accompagner la transition. »

B.B