Dans son premier roman, Abigail As- sor dépeint une fresque saisissante qui interroge les rapports humains dans un Maroc fracturé. Éditions Folio
Dans ce récit à la beauté incandescente , Abi- gail Assor nous emmène dans le Casablanca des années 1990. Sarah, jeune Franco-Maro- caine des quartiers populaires, nourrit un rêve dévorant : échapper à sa condition sociale. Élève dans un lycée français, elle sait que son salut passe par l’argent, pas par l’amour. Ingé- nieuse et déterminée, elle n’hésite pas à jeter son dévolu sur Driss, son regard couleur de thym, son nez crochu et sa démarche mala- droite.
Certes Driss est laid, mais il est « aussi riche que le roi », le plus riche de tous, capable en l’épousant de faire d’elle une reine. Héritier d’une fortune colossale, il est cependant prisonnier d’un père autoritaire et d’un monde qu’il comprend mal. Entre eux, un pacte implicite se dessine. Sarah voit en lui l’outil de son ascension sociale, tandis que Driss, maladroit, mais sincère, découvre peu à peu une complicité inattendue.
Dans ce lien qu’ils vont construire, dans ce désir qu’ils vont expérimenter, dans la cha- leur de leurs peaux mélangées vont s’ériger les murs de leur forteresse, leur permettant d’échapper à leur solitude commune. De ce romantisme qui dans cette ville ne peut exister tant les rapports sociaux donnent aux destins leur orientation, nos deux pro- tagonistes vont pourtant embrasser les contours d’un monde qui leur appartiendra. Mais dans une ville où les inégalités dictent les destins, où l’argent domine, leur histoire semble condamnée.
Bien au-delà d’une simple romance, la plume de l’autrice dissèque avec pertinence et justesse ce qui se révèle dans la complexité des rapports humains de ce Maroc. Dans ce premier roman envoûtant, à l’écriture ciselée, elle nous livre un texte magnifique et bouleversant qui nous happe dans ce qu’il questionne des naufrages et des rêves piétinés et qui résonne comme un appel à la liberté.