Quel avenir pour la transition écologique ?

Emmanuelle Wargon, ministre à la transition écologique et solidaire, a lancé un débat public sur les énergies renouvelables. En pleine canicule, retour sur un sujet ô combien brûlant.

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Malgré le parc éolien de Chamole (visité par la ministre), ce sujet demeure très clivant.

Sobriété énergétique ou décroissance ?

37, 38, 39 degrés au mois de juin : au coeur d’une canicule étouffante, la venue d’Emmanuelle Wargon était très attendue le 27 juin à Poligny. Même si elle n’est pas la plus médiatique (laissant ce soin à son ministre de tutelle, François de Rugy), environ 200 personnes (pour la plupart écologistes, comme l’a montré une forte délégation du « Pic noir ») ont interpellé « Madame transition écologique » sur des thèmes sensibles. Morceaux choisis.

A l’image de Greta Thunberg, une toute jeune militante de « Youth for climate » (la jeunesse pour le climat) a fait une intervention remarquée, apostrophant la ministre sur « l’urgence de la situation ». « A quand des solutions ? » a-t-elle lancé, la meilleure pour sauver la planète  étant selon elle la décroissance économique. L’énergie la plus propre et la moins chère étant celle qu’on ne consomme pas, Emmanuelle Wargon a priorisé la sobriété énergétique…tout en défendant l’économie de marché. La « mère » de toutes les énergies n’est donc encore pas de ce monde, ni même au coeur des débats, même si des efforts bénéficient au secteur du bâtiment entre autres.

A l’instar de la suédoise Greta Thunberg, une représentante de « Youth for climate » a lancé : « Il est urgent d’agir ».

Vent mauvais sur l’éolien

Malgré la volonté affichée de doper l’éolien en France (3 fois plus d’éoliennes à l’horizon 2030 selon Emmanuel Macron), les oppositions demeurent farouches comme l’a rappelé le président d’un collectif régional de 110 associations écologistes : « La distance minimale de 500 mètres avec des habitations n’est pas adaptée à des éoliennes de plus de 150 mètres de haut. Nous demandons que la distance minimale soit proportionnelle à la hauteur, par exemple 10 fois la hauteur, comme en Bavière ». Emmanuelle Wargon a répondu que si une distance minimale d’un km était requise, « il n’y aurait sans doute plus de zones d’implantation possible », eu égard aux nombreuses zones d’exclusion réglementaires. Michel Moreau, figure emblématique de l’écologie champagnolaise, a assuré qu’ « une centaine d’éoliennes pourraient assurer l’autonomie énergétique du Jura, et 12.700 celle de la France ». Emmanuelle Wargon a également visité le parc éolien de Chamole au cours de cette journée marathon, un parc éolien défendu par son « père » Jean-Louis Dufour. Le maire de Chamole, fervent promoteur de l’éolien mise sur la pédagogie, avec la création d’un sentier au pied des éoliennes pour mieux faire connaître cette énergie renouvelable.

Emmanuelle Warnier est ministre à la transition écologique depuis octobre 2018.

Et le solaire ?

Curieusement, alors que notre astre étend année après année son emprise sur le Jura, les projets de centrale photovoltaïque demeurent rares. Un professeur du lycée « Le Corbusier » à Lons le Saunier a plaidé pour l’installation de panneaux sur le toit des bâtiments scolaires, pour permettre à minima une autosuffisance. La création de « centrales villageoises » passe mieux que l’implantation de grands parcs solaires. Yves Poete, maire d’Avignon les Saint Claude, a ainsi fait part d’un projet intéressant sur son secteur (toits publics et privés), grâce au soutien du Parc naturel du haut-Jura.

D’autres énergies vertes à ne pas négliger

D’autres énergies renouvelables on a été évoquées en particulier la méthanisation, avec la visite de l’unité de Gendrey, ainsi que le bois énergie. Le président des communes forestières du Jura a rappelé que 45% du département était constituée de forêts, d’où un énorme potentiel en dépit de l’invasion de scolytes (insectes ravageurs), qualifiée de « catastrophe sanitaire majeure ». Albert Higounenc, ex-président de la communauté de communes d’Arbois, a pour sa part apporté de l’eau au moulin de l’hydroélectricité. Taclant fermement la Direction de l’eau et de la Biodiversité (DEB) qui prône la disparition des moulins, il a enjoint la ministre de ne « pas se laisser endormir par son administration qui lui ment ». Selon lui, un net distinguo –favorable à la production d’hydro-électricité est à faire entre la notion de barrage et celle de seuil.

Plusieurs associations de protection de l’environnement ont interpellé la ministre.

Moins de charbon et de nucléaire 

La ministre a rappelé que le mix énergétique français compte encore un héritage encombrant : 4 centrales électriques à charbon, qui polluent selon elle autant que 4 millions de voitures. Leur fermeture est donc programmée, de même que la « fermeture des deux réacteurs nucléaires de Fessenheim », ainsi que la fermeture de 12 autres vieux réacteurs d’ici 2035. Alors que 72% de l’énergie française provient du nucléaire, le défi s’annonce donc incommensurable. Emmanuelle Wargon a plaidé pour le rééquilibrage du mix énergétique de la France, tout en mentionnant les doutes de certains sur l’objectif affiché (moins de 50% de nucléaire à l’horizon 2035).

Moins de paperasses et plus de stabilité

Plusieurs intervenants ont pointé du doigt les lourdeurs étouffant certains projets novateurs. La DREAL a de son côté soulignés que les dossiers arrivent « tout ficelés » sur son bureau, écartant ainsi son rôle éventuel de conseil. Brigitte Monnet, maire de Val Sonnette a également mis en exergue la nécessité de politiques stables sur le long terme, afin « d’éviter de mauvaises surprises entre le début et la fin d’un projet ».

Dossier réalisé par Stéphane Hovaere