Les seins qui tombent

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Gérard Bouvier.

Certaines de nos expressions coulent de source. Ainsi on comprend bien que ce qui saute aux yeux ne peut pas tomber dans l’oreille d’un sourd. D’autres sont plus alambiquées : aller à fond les gamelles nous étonne. Et j’entendais tantôt reprocher à un politique d’aller de Charybde en Scylla. Un itinéraire effroyable. Charybde était une pimpante jeune femme, fille de Poséidon, Dieu de la mer, et de Gaia déesse de la terre. Mais pour autant elle n’était pas bêcheuse (2) pour un sou et vivait sa vie comme vous et moi. Sauf qu’elle nous fit un jour un caca nerveux comme on en a vu trop souvent dans l’Olympe où vivent des dieux souvent avinés et irascibles (3). Tout ça parce que la bise avait fait voler son chapeau. Folle de colère là voilà bien qui dévore la moitié du troupeau d’Héraclès qui n’y était pour rien. Et qui d’ailleurs était absent au moment du drame (4). Zeus la transforma aussitôt en gouffre marin. C’était la moindre des choses. Quoique cher payé si on veut bien. Scylla était une nymphe. Aujourd’hui on dirait plutôt une petite minette mais à l’époque on disait un peu n’importe quoi (5). Circé la fille d’Hélios, le dieu Soleil, ne pouvait pas la piffrer (6) car elle, qui avait les seins qui tombent, était jalouse comme un pou. Elle la transforma aussi sec en un monstre à six têtes. Et la scella sur un rocher juste en face de Charybde. Ulysse qui avait fait un beau voyage retournait plein d’usage et raison vivre entre ses parents le reste de son âge. Mais il devait passer entre ces deux écueils. Mal conseillé et toutes chocottes au vent, il fit route vers Scylla pour éviter Charybde. Mauvaise pioche ! Scylla trouva bien moyen de lui bouffer six marins qu’on n’a plus jamais revu et qu’on ne reverra jamais. Depuis on dit aller de Charybde en Scylla quand on va de mal en pis. Et c’est souvent.

Notes explicatives…

(1) – Excusez ce titre accrocheur. Il s’agit pour moi d’évaluer les motivations qui conduisent le lecteur à cliquer sur un article pour en savoir plus. La moyenne étant de 400 à 500 accès à la rubrique en format Web en fin de semaine, je pense arriver à 600 avec ce titre libidineux. C’est une expérience… Nous verrons bien. Vous serez tenus au courant en voyant le nombre qui s’affiche en haut à droite et qui comptabilise les accès à la version Web. Rassurez-vous : si vous regardez souvent vous n’êtes comptabilisé qu’une fois.

(2) – C’est tout à son honneur car on en connait beaucoup qui ne sont ni fils de la mer, ni fils de la terre et qui néanmoins la ramènent jusqu’à la limite du harcèlement. Comme quoi on n’est pas tous pareils.

(3) – Les prises de tête et les grands n’importe quoi dans l’Olympe justifieraient un numéro spécial de France-Dimanche à eux tous seuls. J’en veux pour preuve l’histoire de Cerbère, ce chien monstrueux à trois têtes dont le corps se termine par une queue de dragon (excusez du peu !). Ce babeu garde la porte du royaume des morts et ne laisse entrer aucun vivant. Ni journaliste, à plus forte raison. Aux dernières nouvelles il aurait laissé entrer Orphée qui jouait de la lyre et il l’aurait endormi. On a le droit de ne pas apprécier la musique mais là c’est trop. Il y a plein d’autres anecdotes du même tonneau mais je sais que vous en auriez vite marre.

(4) – Bien sûr on ne tient pas là une preuve définitive pour le disculper car il aurait pu tout aussi bien envoyer un complice.

(5) – Les choses ont bien changé et j’en veux pour preuve cette rubrique…

(6) – Ne pas piffrer quelqu’un c’est l’avoir dans le nez. De « pif » qui a donné aussi s’empiffrer quand les gens se bouffent le nez.