Dieu est Amour…

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Gérard Bouvier.

Et deux religions s’entretuent au point qu’il devient impossible de compter les morts,
disposés au sol dans des sacs blancs entachés de la marge d’erreur.
C’était aussi tantôt l’inauguration par notre Président, à Villers-Cotterêts, où naquit
Alexandre Dumas, de la Cité Internationale de la Langue Française.
Dieu… La Langue…
L’occasion de constater combien nous avons -chez nous- les citations bibliques sur
le bout de notre langue. Sur les réseaux sociaux, sautons-moutons (1) au-delà de
l’inévitable « Pauvre France » (2) qui en deux mots et bien des sous-entendus fait
l’économie de tant de discours. Et voici -venu du diable-vauvert (3) et répétée jusqu’à
plus soif- la remarque si consensuelle qu’elle tue sans même avoir besoin de viser :
« Faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais », une citation de l’Évangile de
Matthieu (4).
Cette phrase, Kalachnikov des philosophes érudits et des redresseurs de torts
patentés, en a laissé plus d’un sur le carreau. Elle s’adresse tout autant à l’écologiste
qui voyage, qu’à la ménagère abonnée à Netflix et affamée par l’augmentation des
carottes. Et aussi à ceux qui, garés sur les places réservées aux handicapés, exigent
de chacun le respect de la loi partout de la rue jusqu’aux trottoirs. Et la sévérité
implacable qui va avec.
On trouve d’autres citations en kit prêtes à l’emploi serrées comme des harangues
dans une boite à fourbi. Chacun pourra choisir. Nous avons en tête de gondole le
choix mortifère entre la peste et le choléra, le retour incessant du serpent de mer, la
redondante vérité qui fâche, le visionnaire nul n’est prophète en son pays, le très
gaulois rendons à César ce qui est à César… Les moyens ne manquent pas de
donner du relief à ses idées à peu de frais avec l’assentiment populaire en pot ou en
tube, en pommade ou en gargarismes.

Quelques notes pour donner un peu de relief à ce texte :

(1)- Ne croyez pas que je fais une fixation, mais ces anglais tout de même ! Alors
qu’ils se glosent et qu’ils gloussent de nous voir manger des cuisses de grenouilles
ils disent non pas « jouer à saute-mouton » ce qui est une évidence jusque dans les
cours de maternelles, mais plutôt « to play leapfrog » c’est-à-dire jouer à faire des
sauts de grenouilles. Et de même quand vous et moi avons un chat dans la gorge, ce
qui découle de l’anatomo-physiologie de base connue de tous les ORL, eux, ont (je
cite) une grenouille dans la gorge ! Je ne dis pas qu’il y a là une certaine hypocrisie
mais j’observe qu’il n’en manque plus guère. Et chaque jour je remercie ma mère
d’être né français. Et mon père aussi mais lui était plus un matheux qu’un littéraire.

(2)- « Pauvre France ! » est une lamentation récurrente chez nombre de nos
concitoyens. Beaucoup ont connu dès leur plus jeune âge la chienlit. Il y a souvent
une couleur politique qui se cache sous les rideaux mais je vous laisse chercher…
Les anglais quand leurs affaires sont au plus mal ne disent pas « Pauvre France ! »
mais ils disent plutôt (avec leur fameux accent anglais si reconnaissable) : « My tailor
isn’t as rich as you think ». À noter que la chienlit est bien antérieure à mai 68
puisqu’elle apparait en 1534. Lors de sa création c’était un des rares mots de la
langue française à être aussi bien féminin que masculin. Mais si l’on y réfléchit bien
c’était parfaitement justifié. À mon avis. Mais le mot a évolué et aujourd’hui il est
féminin. Rarement utilisé au pluriel alors que pourtant souvent il y aurait matière.

(3)- Ne cherchez pas le diable vauvert sur la carte. Surtout ne le faites pas si vous
avez uniquement sur vous la carte du Jura. De base, c’est un endroit très éloigné. De
plus, le cosmos est en expansion et son expansion s’accélère. Dans ces conditions
tomber nez à nez avec le diable vauvert relève de la gageure.
Mais on dit qu’à l’origine l’expression est née des actes blasphématoires qu’on
commettait au Moyen-Âge au Château de Valvert à quelques lieux de Paris. Au
XIIIème siècle Saint Louis qui était un saint homme décida de purifier l’endroit et
aussi l’envers. Le mieux était de créer un couvent. Alors, il créa un couvent. L’histoire
ne dit pas si la réputation actuelle de bonnes mœurs en Ile-De-France découle en
ligne directe de cet acte conjuratoire.

(4)- Cette expression nous vient de l’Évangile selon Saint Matthieu (chapitre XXIII ;
versets 2 et 3). Elle dit dans sa version originelle : « Observez donc et faites tout ce
qu’ils vous diront, mais ne faites pas ce qu’ils font, car ils disent ce qu’il faut faire
mais ne le font pas ». J’aurais pu vous citer le passage direct live en latin puisque j’ai
Google comme tout le monde mais je n’ai pas souhaité mettre dans l’embarras ceux
qui parmi vous sont peut-être à peine moins polyglotte que leur voisin du dessus.
Cette expression reprise à l’envi est aujourd’hui usée jusqu’à la corde.
Toute proportion gardée, elle n’a strictement rien à voir avec cette citation de Pierre
Dac : « Je me suis toujours étonné qu’un record battu ne se soit jamais plaint ».