Trois questions à Manuel Rodriguez

Rencontre avec un décideur novateur et engagé.

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Mise en sommeil en mars 2022, la production reprend à la Jurassienne de Céramique.

Manuel Rodriguez, vous êtes dirigeant du groupe Kramer et de la Jurassienne de céramique française (ex Jacob Delafon). Après une phase d’arrêt de plusieurs mois due notamment à la flambée des coûts du gaz, voici que la production reprend des couleurs. Comment expliquez-vous cette relance de l’activité, alors que les cours de l’énergie sont pourtant restés les mêmes ?
Les cours de l’énergie ne sont pas restés les mêmes, ils sont au niveau d’il y a un an, qui étaient déjà 4 fois supérieurs aux cours historiques !
La bonne nouvelle c’est qu’ils sont retombés par rapport aux niveaux constatés après l’invasion de l’Ukraine, nous étions montés et de manière durable alors à plus de 10 fois le cours historique. C’est la raison pour laquelle nous avions mis la production (et non l’usine dans son entier) en sommeil en mars 2022. Si nous avions bloqué un prix d’achat du gaz et de l’électricité, nous serions à des cours d’achat impossibles à soutenir, c’est ce qui arrive à la grande majorité des entreprises en fin de contrat et à qui les fournisseurs d’énergie imposent de bloquer les prix, sur une base trop haute.
Nous avons la chance d’avoir pu négocier avec notre fournisseur un prix au cours moyen du jour. Notre stratégie consiste à miser sur un prix moyen « acceptable » pour relancer et maintenir une production. Nous avons tenu compte également du dispositif d’aides annoncées par Bercy pour soutenir l’industrie et notamment les gros consommateurs dont nous faisons partie.
Il est important de préciser que si une grande partie du personnel de production a été placée en activité partielle, la totalité des équipes de maintenance et de développement a travaillé durant tous ces mois à des travaux d’isolation qui ont permis une économie d’énergie de 35% et de développer une cinquantaine de nouveaux produits dont près de la moitié est prête à entrer en production.

Quels sont vos objectifs de production pour cette année 2023 ?
Notre carnet de commande est de 90.000 pièces au moment où je vous parle. Dans l’état, au cours actuel de l’énergie, nous ne pouvons envisager de produire qu’un tiers de ce volume, soit 30 à 40.000 pièces, en tenant compte du cours de l’énergie, du recours à l’activité partielle avec, je le précise, le maintien à 100% du salaire des collaborateurs concernés par l’entreprise et, comme indiqué plus haut, des dispositifs d’aides annoncées par Bercy.
Le site emploie aujourd’hui 58 salariés, dont plusieurs nouvelles embauches. A terme, le site produira 200 à 250.000 pièces annuelles et emploiera un effectif de 150 personnes. Le rétro planning dépend plus de l’évolution sur le plan de la crise énergétique que de nos clients…

Élus, salariés, acteurs économiques, beaucoup s’interrogent… Comment envisagez-vous l’avenir du site de Damparis à moyen et long terme ?
Au pire de la crise énergétique je puis vous assurer que pas un seul instant je n’ai envisagé la fermeture du site de Damparis. Sans prédire un avenir aussi glorieux que nos illustres aînés Emile Jacob et Maurice Delafon qui ont employé jusqu’à 800 personnes dans les années 80, je peux vous assurer que tout est mis en œuvre aujourd’hui pour préparer les échéances futures, à savoir produire et vendre nos produits, mais également investir sur l’outil informatique qui permettra dès la fin février 2023 de gérer un si gros paquebot comme l’est le site de Belvoye : la maintenance du site, son embellissement, son outil de production que nous modernisons et, au centre de tout, l’humain, à commencer bien sûr par nos propres collaborateurs dont le courage n’a d’égal que l’abnégation dont ils font preuve, mais également les futurs collaborateurs de la JCF, avec un accent particulier qui sera mis sur la formation.
Je demande à tous les acteurs de nous maintenir leur confiance comme le font au quotidien l’ensemble des collaborateurs de la JCF qui constatent qu’à l’évidence tout ce que je leur ai annoncé les yeux dans les yeux a été respecté et, qu’à défaut de briller de nouveau de mille feux, l’usine est bel et bien en activité.
Nous sommes de retour, encore là, et pour longtemps !

 

Manuel Rodriguez.