Vincent Morineau, à votre arrivée, dans quel état se trouvait l’île ?
« Je dois dire que c’était pire que ce que j’imaginais, à mon arrivée j’ai été frappé de voir des paysages lunaires ! On travaillait sur la partie nord de l’île, la plus ravagée par le cyclone et c’était comme si on avait pris un peigne et complètement mis à nu la terre. La plupart des arbres ont été arrachés, un de mes collègues qui est originaire de Mayotte nous racontait que d’ordinaire l’île est très verte et à présent par endroit, il ne reste plus que la couleur de la terre.
L’habitat qui était déjà assez sommaire n’a pas tenu le choc et beaucoup de maisons sont en très mauvais état. »
En quoi consistait votre quotidien sur l’île et l’objectif de vos missions ?
« Pour nous, l’objectif était de ré-alimenter au mieux la centaine de personnes sur notre secteur qui ne l’était pas encore. Le plus gros du travail sur les lignes à haute et moyenne tensions avait déjà été effectué par nos collègues des deux cohortes précédentes avant notre arrivée. Notre mission était plus d’aller chercher la population, taper aux portes et faire un travail de fourmi, il s’agissait de faire du branchement, en clair le fil qui relie la rue à la maison. »
Quels étaient vos horaires de travail en sachant que Mayotte se trouve actuellement en période de forte chaleur ?
« Nous commencions assez tôt le matin, mais à Mayotte il est plutôt de tradition de se lever tôt pour se prémunir de la chaleur l’après-midi. On se levait à 5 h, après un petit déjeuner et une mise en jambe, on réalisait un briefing avant de démarrer la journée avec les locaux et nos collègues, agents d’électricité de Mayotte (EDM), puis nous prenions le départ vers 7 h 30 pour travailler.
L’après-midi, la nature nous rattrapait et nous ne dépassions jamais les 17 h, le thermomètre de mon véhicule a frôlé les 44° avec des taux d’humidité assez élevés. »
Quelles étaient les conditions de vie et de sécurité sur place ?
« On avait été bien sensibilisés avant notre départ sur l’aspect sécuritaire sur l’île, heureusement nous n’avons jamais eu de problème, l’insécurité avait tendance à se faire sentir mais nous étions escortés par des locaux bien connus et respectés par la population, en revanche nous ne sortions pas la nuit, couvre-feu oblige.
Côté hébergement, nous étions accueillis dans l’enceinte d’une centrale thermique EDM sous protection militaire sur la commune de Longonie. Nous dormions sous des tentes avec des lits de camp et moustiquaires, rustiques mais efficaces ! »
Pourquoi avez-vous décidé d’être volontaire pour partir à Mayotte et quelle expérience en gardez-vous ?
« Cela fait 25 ans que je travaille au sein de l’entreprise et j’ai toujours participé aux forces d’interventions rapides (FIRE) mises en place à la suite de la tempête de 1999 et c’est toujours une fierté d’y participer. Nous avons été tenus informés qu’il fallait envoyer des agents à Mayotte pour prêter main forte, de fil en aiguille, entre collègues intéressés, nous avons créé un compte WhatsApp et c’était parti. Je garde de cette expérience beaucoup d’enseignement, à la fois sur le plan humain et professionnel, on a pu échanger avec les locaux, manger chez eux et ils étaient heureux de nous voir, les portes s’ouvrent facilement.
De plus on apprend beaucoup, il a fallu s’adapter avec des conditions pas simples et on apprend par la suite à prendre du recul sur certaines contraintes sur des opérations en France, avec parfois une petite phrase qu’on se dit entre nous « T’as pas fait Mayotte ! » »
Dans cette mission, Vincent Morineau était accompagné de trois autres Jurassiens : Clément Jeantet, Charly Millet, Triciot Pédro.
E.S.