Rubrique. Grands Mots Grands Remèdes : Pétage

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Docteur Gérard Bouvier
Docteur Gérard Bouvier

Ils sont nombreux les faits divers odieux qui secouent l’actualité en provoquant notre étonnement et bien souvent notre colère (1). Et l’on cherche en vain une explication aux pires ignominies qui sèment l’effroi dans la presse. On voudrait savoir comment il est possible d’arriver à de telles crapuleries, à une telle violence. On voudrait trouver des raisons au déraisonnable… (2).
Autrefois l’explication avancée était souvent : « j’avais trop bu, j’étais fin pété ! ».
Mais la conscience collective évolue et désormais cette « excuse » a valeur de circonstance aggravante. C’est heureux mais ça met les coupables en difficulté. Il a donc fallu se tourner vers d’autres échappatoires…
On entend très souvent évoqué le « pétage de plomb » qui expliquerait désormais l’injustifiable et lui donnerait tout son sens. Selon les dons de chacun pour la mécanique, on en rencontre qui pètent une durite ou qui pètent un câble. Les plus maladroits -et de façon très insuffisante- perdent les pédales ou tout simplement perdent la boule (3) (4). Pas de quoi se tirer d’affaire ! Même avec un bon avocat.
Le plomb est fusible. C’est son moindre défaut et cette propriété est un atout pour les circuits électriques. En cas de surtension il fond, coupe le circuit et protège les appareils en aval. On retrouve aussi des fusibles dans la vie démocratique en cas de tensions risquant de mettre à mal un gouvernement.
Désormais les fusibles se sont modernisés et les disjoncteurs ont pris la relève. Mais certains d’entre nous continuent de péter les plombs avec plus ou moins de talent quand les informations qui traversent notre cerveau empruntent sans prévenir des chemins de traverse.


Notes en vrac :

(1)- Les attaques au couteau, à la machette, au tournevis ont fait trembler le journal de 20 heures ces dernières semaines. Mais le pire fut sans doute la victoire du PSG qui dans la nuit du 31 mai au premier juin fit deux morts et 190 blessés. Les pétages de plombs collectifs sont fréquents autour de nos compétitions de football qui pourtant restent encore en accès libre sans limite d’âge.

(2)- Il peut être difficile de trouver des raisons aux évènements qui nous choquent. Et souvent on bute sur un cul de sac qui nous rappelle que -cherchez pas !- c’est la raison du plus fort qui est toujours la meilleure. Là-dessus… le loup l’emporte et puis le mange, sans autre forme de procès.
Toute ressemblance avec une actualité géopolitique est drôlement convaincante.

(3)- Perdre les pédales est évidemment un incident fâcheux propice à se retrouver cul par-dessus tête. Au sortir de deux Tours de France, féminin et masculin, qui nous ont fait vibrer attardons-nous un instant sur le jargon des pelotons.
En avoir sous la pédale c’est tenir une forme prometteuse et ne pas avoir gaspillé ses forces prématurément. En garder sous la pédale c’est s’économiser pour mieux flinguer quand l’opportunité se présentera c’est-à-dire quand l’adversaire principal aura un coup de moins bien. Mais la popularité du cyclisme est devenue telle que son jargon a quitté les rangs serrés du peloton. Et maintenant en ville comme en campagne -et pas seulement en Alsace- il n’est pas rare de croiser des concitoyens en danseuse ou qui pédalent dans la choucroute. Adressons-leur un bref regard compatissant avant de continuer notre route puisque nous avons la chance de pédaler dans l’huile.
Un sport tout autre est venu s’inspirer des exploits de nos champions, c’est le rétropédalage, entré dans notre vocabulaire en 1902 mais qui semble faire florès dans nos démocraties modernes. C’est heureux car souvent le pédalage nous mène droit dans le mur et le rétropédalage -s’il nous mène droit dans le mur opposé-, nous donne un court moment l’espoir d’échapper au pire.

(4)- On peut aussi sortir de ses gonds. Ça s’est déjà vu.
Le gond, cette pièce de métal servant de pivot, fut une invention géniale qui n’a malheureusement jamais eu la reconnaissance qu’elle mérite comme ont pu l’avoir le smartphone, le GPS, la catapulte ou la râpe à fromage. Pourtant, sans gongs, adieu volets, portes, fenêtres. Et dans nos maisons ouvertes aux quatre vents bonjour les rhumes et fluxions de poitrine.

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