Une chercheuse Franc-Comtoise récompensée pour ses travaux sur l’autophagie

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À 33 ans, Aurore-Claude Taupin est chercheuse postdoctorante à l'INEM ©Fondation L'Oréal.

Une reconnaissance, de l’émotion et la preuve surtout que l’on peut réussir dans le monde de la science sans passer par un baccalauréat scientifique. Avec ce prix reçu de la Fondation L’Oréal-Unesco, qui récompense chaque année une trentaine de chercheuses (35 cette année), Aurore-Claude Taupin est aussi honorée pour cette dizaine d’années à travailler sur un processus des cellules de notre corps : l’autophagie. « Ce terme signifie littéralement « se manger soi-même. » Pour se maintenir en bonne santé, nos cellules ont besoin de se renouveler en « supprimant » certaines erreurs. C’est ça l’autophagie, en résumé. Le problème, c’est que les cellules cancéreuses ou métastatiques utilisent ce processus pour survivre. Il faut donc étudier le comportement de ces cellules cancéreuses et le rôle précis joué par l’autophagie dans leur développement pour savoir quand et comment l’inhiber. Cela éviterait à terme une rechute des patients », explique la chercheuse originaire de Fougerolles, installée dans les laboratoires de l’Institut Necker Enfants Malades, à Paris.

« Les études longues, je ne voulais pas en entendre parler ! »

Pour en arriver là, Aurore-Claude Taupin a très tôt compris que son avenir serait lié à la science. « J’adorais ça et l’anglais, les deux étaient souvent liés mais je détestais les mathématiques ! J’ai refusé de passer par la « voie royale » du Bac Scientifique, pour m’orienter vers une filière technologique, en sciences et techniques de laboratoire (STL) à Luxeuil-les-Bains. J’ai ensuite passée un BTS et je suis allée petit à petit jusqu’au doctorat ! », rigole l’intéressée en se remémorant son stage de 3e. « J’étais avec une pharmacienne qui parlait de son doctorat et les longues études à l’époque je ne voulais pas en entendre parler ! Au final, étape après étape, j’y suis arrivée. »

©Clemence Losfeld

« Les filières technologiques, c’est génial ! »

Une scolarité qu’elle débute en Haute-Saône donc, avant de débarquer très tôt à Besançon, au collège Saint-Ursule en section Européenne puis au lycée Saint-Paul en seconde avant d’entamer les études supérieures où Aurore-Claude Taupin se penche rapidement sur l’autophagie. « J’ai commencé à travailler dessus avec le cancer du sein, c’était en partie le sujet de ma thèse à Besançon, en 2013. Puis il y a eu dix ans d’expériences enrichissantes et ce prix l’Oréal récompense ce parcours dans sa totalité, d’une certaine manière. » Recrutée depuis un an comme chercheuse à l’INSERM, la Franc-Comtoise pilote une équipe autour de l’autophagie. « J’ai cassé ce mythe de passer par la voie générale pour réussir à faire ce que l’on veut plus tard. À mon époque, ce choix de filière technologique était très mal perçu, on me disait que c’était un choix de seconde zone. Finalement, ce fut une force tout au long de mon parcours, j’ai eu plus de diplômes que les autres au même âge, il existe plein de passerelles dont beaucoup ignorent l’existence. C’est génial les filières technologiques et il faut le dire ! »

Ce prix Jeunes Talents L’Oréal-Unesco s’accompagne d’une jolie somme, 20 000 €, pour permettre à Aurore-Claude de financer ses recherches. « En toute honnêteté, nous ne sommes qu’aux prémices de notre projet. J’étudie le rôle des forces mécaniques et tente de comprendre l’impact du microenvironnement sur les cellules. On est concentré sur les cancers rénaux mais l’idée pourrait être appliquée à tous les types de cancers. J’espère que dans un an ou deux, nos avancées permettront de cibler d’autres étapes de l’autophagie et d’obtenir des conclusions plus précises. Dans le monde de la Recherche, il faut aimer l’échec, être persévérant et c’est très compliqué par moment. À l’inverse quand tout fonctionne, c’est très suspect. Il y a un facteur chance que l’on provoque par le travail. »

Elles sont 35 à avoir été récompensées cette année pour des travaux scientifiques. ©Nicolas Gouhier

« Porter mon histoire auprès des jeunes filles »

Avec ce poste à responsabilité, Aurore-Claude Taupin défend aussi deux autres idées : la première fait partie des fondements de la fondation L’Oréal-Unesco : la place des femmes dans la Recherche. Elles ne sont que 33 % dans le monde, 29 % en France. « J’ai déjà entendu des remarques sexistes et l’absence de femmes dans la recherche freine directement certains secteurs qui nous concernent plus comme le cancer du sein par exemple. »

Mère de deux enfants à 33 ans, la Franc-Comtoise ne s’est jamais imposée de barrières pour privilégier son travail : « L’écho de cette récompense me permet aussi de porter mon histoire au plus près des jeunes filles, collégiennes ou lycéennes qui peut-être se disent que les sciences, la santé ou simplement faire carrière demandent trop de contraintes. J’espère que sur le long terme ce prix et cette trentaine de lauréates récompensées chaque année, changeront les choses. »

 

M.S