C’est un nouveau jour. Encore un. Merci.
Contemplation instinctive, fraction d’éternité immobile, réintégration progressive.
Sortie sur la terrasse, déjà 17 degrés au thermomètre.
Initiale inhalation, première bouffée d’air frais : la meilleure, la plus importante.
Réjouissante oxygénation, dans la pâleur d’une aube estivale bienveillante et complice. Progressive évaporation de la pleine lune sur les tournesols, là-bas, au loin.
Les blés viennent d’être moissonnés.
Il est cinq heures. Solitude exaltée, face au grand nuancier céleste, qui vire peu à peu du blanc au turquoise.
Confrontation aux éléments, aux souvenirs, aux regrets. C’est le grand retour.
Le grand rappel à l’ordre. L’avertissement récurrent. « Souviens-toi et n’oublie pas ! »
Se remémorer, quand tout était différent, bien avant les honneurs des projecteurs médiatiques, avant la reconnaissance, l’aboutissement, l’accomplissement.
Avant d’avoir appris, compris, intégré cette capacité vibratoire, d’attendrir, de séduire, d’influencer.
Avant que l’esprit ne prenne le pouvoir sur la matière, finalement…
Nostalgie d’une époque révolue, de temps troublés, trous blancs insouciants, puis retour à la réalité immédiate. Impérative continuité des mots, des sens et des images. Des passions, des conversations, des opinions.
Poursuite de ce contraste ambiant, saisissant, pendant que se déroule le cycle des saisons, des époques et des amours.
Aimé et être aimé pour ce que l’on est : quel beau défi !
Pourtant l’angoisse me saisit. Dans deux semaines, mes écrits disparaitront des tables de salon, des salles d’attentes, du fil d’actualité des smartphones.
Périlleux exercice que celui de devoir se résigner à s’éteindre. A redevenir transparent, anonyme, inutile… D’accepter cet arrêt sur image de quatre éditions, imposé par le calendrier (et accessoirement le code du travail).
Difficile, de rompre avec l’effervescence, de briser le mouvement, de couper l’allant qui nous réalise.
Effrayant même, de ressentir l’absence, la mélancolie, la distance. Même si c’est pour mieux revenir. Quand bien même le grand retour s’avèrerait prometteur.
Intégrer le flux et le reflux. C’est ce que les plages italiennes me permettront peut-être d’opérer d’ici quelques jours. Entre les dunes sablonneuses et les herbes folles qui oscilleront au gré d’un vent aléatoire, j’aurai alors pour objectif d’appréhender l’inconnu(e)…, d’apprivoiser l’imprévisible, de sonder l’incertitude.
D’envisager l’après, d’anticiper la rentrée, les tendances, le brouillard d’octobre qui dans moins de cent jours, viendra déjà nous envelopper de sa morne léthargie.
Trouver des raisons d’avancer, entre devoir et pouvoir.
Faire avec ce que l’on a. Ou ce que l’on a pas. Intégrer l’absence, le manque, la pluie, la nuit. Mais toujours grandir, s’élever, s’exalter et s’émouvoir…
Rester naïf, idéaliste, peut-être utopiste, mais vivant. Acteur de son propre rôle, dans tous les cas.
Avant que le rideau ne tombe, et que le grand silence ne nous relègue à l’oubli.
Avant le grand retour auquel je crois, qui nous offrira la chance de tout recommencer.
En mieux…