Dans le langage de nos jeunes d’aujourd’hui les mythos sont des mensonges. Mais
je ne suis plus très jeune. Je vais donc vous présenter une vraie histoire de la
mythologie. Sans mensonges, ni coups foireux, ni mystification.
Juste quelques inexactitudes facilement pardonnables puisque les contes et
légendes que vous lirez ici datent de bien avant la guerre.
Il n’y a pas si longtemps on a fait grand cas, chez nous, de Jeux prétendument
Olympiques. Une exagération dont nous sommes friands. Comme me disait tantôt la
Marie-Madeleine Bailly-Salins, une cancouane du Haut Jura de mes amies, « si ces
jeux étaient à ce point olympiques vous pensez bien que ça se saurait ». Et c’est un
fait !
J’ai donc décidé parce que ma rédac-chef me l’a demandé gentiment de vous
raconter ici la vraie histoire des dieux de l’Olympe. Sans fioriture, sans baliverne et
avec un minimum garanti de billevesées ou coquecigrues. Bien sûr, il est toujours
possible que quelque faribole se glisse dans le récit malgré tout le soin que j’y
apporte mais ce serait dommage. Et même un peu embêtant.
Beaucoup croient -à tort- que les aventures olympiques ont débuté à Marseille en
1904 au stade de l’Huveaune qu’ils considèrent comme le père putatif du Stade
Vélodrome. Mais c’était avant les vélos. Non point que le vélo n’existât pas mais ils
étaient régulièrement volés et restait archi-minoritaires par rapport aux pieds qui
étaient très utilisés pour les déplacements de faible amplitude. Ne sombrons pas
dans des exagérations si courantes à Marseille : ce sont -le plus souvent- les seules
sacoches qui étaient volées.
En réalité, les premiers Jeux Olympiques eurent lieu à Olympie en Grèce en 776
avant notre ère. C’était une sorte de Festival d’Avignon mais à la mode ancienne
avec beaucoup de buvettes et de sports : pétanque, surf, boxe française et d’autres
encore dont on a perdu la pratique et même jusqu’au nom.
Mais l’Olympe était surtout connu pour ses dieux nombreux et vénérés. Aujourd’hui
dans une société qui a d’autres chats à fouetter ces dieux sont souvent passés sous
silence. Ce qui n’est guère poli.
C’est pourquoi il est encore temps de réparer ce préjudice. Ce que je vais faire ici.
Le principal dieu de l’Olympe est Zeus que les latins appelleront plus tard Jupiter.
Mais si vous regardez bien l’étiquette, c’est le même.
Zeus (prononcez Zeusse) est ni plus ni moins le roi des dieux dans une configuration
permissive où la religion et la royauté se partagent les mêmes strapontins. On n’est
pas près de revoir la même !
Évidemment, en tant que dieu, Zeus avait tendance à se la péter. Passe encore…
Peut-être aurions nous fait pareil. Mais plus grave : c’était un chaud lapin. En latin :
calidus cuniculus. Je n’ai pas fait grec. Sinon ç’eut été avec plaisir.
Zeus vivait maritalement avec Héra, qu’il appelait familièrement « ma déesse » ce
qui n’était point faux puisque Héra (prononcez Héra) était la reine des dieux.
Quand vous êtes une déesse antique appariée à un chaud lapin vous devez vous
attendre à bien des tromperies. Héra, malgré son physique avantageux s’attendait
donc à bien des déboires mais ce fut encore bien pire. Et ça tombait mal car elle était
très jalouse.
Était-elle jalouse parce que trop souvent trompée ou était-elle trompée parce que ça
jalousie commençait à bien chauffer les oreilles de Zeus ? Ni Aristophane, ni
Sophocle ne sont loquaces sur ce sujet. Ne compter donc pas sur moi pour faire
mieux que ces grands auteurs.
Comble de la déconnade Héra était célébrée comme la déesse du mariage et elle
devait garantir et protéger la fidélité entre les époux. Il y a bien fallu que ça tombe sur
elle ! Un fait exprès ! Chaque fois qu’elle célébrait son ministère de déesse de la
fidélité, elle ne pouvait s’empêcher de penser à son Zeus qui, quelque part en
Olympe, était probablement en train d’aller en blondes et d’entriôler une belle
mortelle avec l’idée coupable de chenailler un bon coup.
Ou plusieurs…
Mais même pour un dieu olympique la gaudriole n’est pas si simple et ne vous tombe
pas du ciel prête à consommer.
Non ! Pour ne pas se faire pincer et ne pas éveiller les soupçons de ses proies il
devait se déguiser. Ô pas en Zorro ou en Mickey ! Il fallait prendre des traits qui
mettent en confiance la dulcinée d’un soir. 1 Car Zeus, au saut du lit et brut de
décoffrage, était plus inquiétant qu’attendrissant. C’était une sorte de Bérurier des
cieux et les jeunes filles en fleurs redoutaient plus que tout de le croiser au coin d’un
bois. D’ailleurs, dès leur plus jeune âge, on leur recommandait de ne jamais accepter
des bonbons de Zeus et souvent leurs pères (parfois leur oncles) rasaient les bois
pour en réduire les coins -dans la mesure du possible-.
Zeus détenait la foudre et la brandissait en toutes occasions pour ajouter encore à sa
majesté. C’était sa flamme olympique à lui et c’est sûr que ça foutait les jetons. Tous
le savaient : que tu sois couché, assis, debout ou légèrement penché en avant Zeus
te foudroie en un rien de temps si c’est son bon vouloir. Et hélas, de bon vouloir il
n’en manquait pas…
Dans le Péloponnèse, donc en Grèce, vivait Lycaon roi d’Arcadie. Lycaon n’aimait
pas les dieux. Au point que, selon Ovide, c’est son manque de piété qui déclencha le
Déluge. Pour des raisons obscures où sans doute domine la jalousie -si fréquente en
ces temps reculés- il n’est pas le saint patron des marchands de parapluie ayant du
céder la priorité à Saint Médard dont il faudra bien que je vous parle un jour. Mais un
autre jour.
Lycaon était le père de Callisto, une jeune fille très belle qui avait fait le vœu de
chasteté pour se faire bien voir de la déesse vierge Artémis qui était la déesse de la
nature sauvage, de la chasse et des accouchements. Excusez du peu ! Il y a du pain
sur la planche. D’autant qu’Artémis était la sœur jumelle d’Apollon ce qui provoquait
D’un soir et parfois aussi du lendemain matin.
quelques selfies et séances de dédicaces impromptues auxquelles elle ne savait pas
dire non.
Un jour où Callisto faisait la sieste sous un olivier -nous étions en été- Zeus, passant
par là par hasard, la vit et en tomba aussitôt raide amoureux. Un véritable coup de
foudre ce qui n’est pas banal pour le dieu censé être le détenteur et le porteur de la
foudre. Mais si on y réfléchit bien qui d’entre nous en transportant son café ne l’a
jamais renversé sur sa propre chemise.
Zeus décida sur le champ de partager la couche de Callisto et pour être plus
convaincant il se métamorphosa en Artémis. Il avait ce pouvoir et en abusait
volontiers. Callisto ne résista guère plus d’un quart d’heure aux avances de cette
fausse Artémis.
Les jours passèrent et son ventre vint à s’arrondir. Un jour qu’elle se baignait toute
nue une saute de vent soudaine jeta ses habits dans les nues. Artémis qui avait
quelques notions de physiologie, comprit bien vite qu’il y avait anguille sous roche et
peut-être plus encore qu’une banale anguille. Elle entra dans une grande colère, s’y
enferma et avala la clé.
Callisto fut chassée comme une malpropre dans les bois d’Arcadie où elle survécu
misérablement se nourrissant d’olives et d’huile d’olive. Elle mit au monde un fils
qu’elle appela Arcas. Elle l’eut appelé Arcasse si elle eut tétée une fille mais c’était
une garçon. « Il faut faire avec ce qu’on a », me souffle la Marie-Madeleine.
Quand Héra apprit son infortune par les réseaux sociaux elle fit une caca nerveux et
poussa des cris affreux. Elle descendit sur Terre malgré les risques encourus, chopa
Callisto et te lui mit une tambournée qui n’était pas sans rappeler le Bourreau de
Béthune. Elle s’était promis de ne pas pétouiller et de faire un max si bien qu’elle
n’attendit pas même la fin de l’épistaxis de Callisto pour la transformer en ourse à la
surprise générale.
Les années passaient. Arcas, dans la forêt devenue son refuge, grandissait. Il devint
un habile chasseur. Un jour qu’il s’était aventuré au-delà de la friche à l’Antoine, il
rencontra une ourse dont il ne lui vint pas à l’idée qu’elle pouvait être sa mère. Dites !
Comment voulez-vous ?
Il banda son arc et visa le cœur.
Zeus qui nous surveille tous de là-haut fut soudain très effrayé. Il ne voulait pas que
ce soit dit car même les dieux ont leur fierté mais il ressentait confusément que tout
ce fourbi était de sa faute. Quelque part.
Il décida d’intervenir et il prit l’ourse qui avait été son amante et son fils Arcas et il
t’envoya tout ça dans les cieux. Ni vu ni connu, pas pris.
Sur le plan de l’écologie pure c’était très malfaisant car enfin les cieux ne sont pas
une poubelle. Mais nous y gagnâmes la Grand Ourse et la Petite Ourse deux belles
constellations dont il me semblait important que vous connaissiez l’histoire vraie et
définitive.
Je reviendrai vous parler de l’Olympe. Si je ne suis pas renvoyé.