Hervé Cuynet un jurassien champion de France : petit team, grande maîtrise !

Mordre le bitume au volant d’une Clio. Défi réussi d’un jurassien, Hervé Cuynet, aujourd’hui champion de France en compétition automobile, catégorie TTE : Trophée Tourisme Endurance.

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Hervé Cuynet, vous avez 52 ans et êtes gérant à Dole de la société de transports routiers éponyme, fondée en 1966 par Claude votre père.
Notre entreprise, originaire de Champagnole est familiale. Et pousser la mécanique aux limites, c’est sûrement dans nos gènes. C’est mon vieil oncle Roland qui créa l’Association Sportive Automobile du Jura et le premier rallye sur neige « la ronde du Jura ». Claude, mon père était pilote de rallyes sur Cooper S puis sur Renault, avant de se lancer dans les courses de camions. J’ai d’ailleurs pu moi-même participer à 4 courses en 1991 et 1992.

Et finalement vous abandonnez la compétition camionnesque pour nettement plus modeste !
Vous voulez dire, la Clio ? Oui, mais auparavant je me suis surtout occupé de l’entreprise. Je l’avais reprise en 2002. Ce n’est qu’en 2008 que j’envisage à nouveau la compétition automobile. J’achètealors une Clio 2 RS que j’engage en 2009 en groupe N dans les épreuves de la coupe de France des circuits.

C’est la compétition de Madame ou Monsieur tout le monde ?
Presque. En tout cas, c’est l’idée de ce challenge : permettre la compétition automobile dans la formule la moins coûteuse pour la rendre accessible au plus grand nombre d’amateurs.

Vous pouvez préciser ?
Lancée sous l’appellation Inter ligue dans les années 1970 avant de devenir en 1980 Trophée Fédéral des Circuits, c’est aujourd’hui la Coupe de France des Circuits, « La Coupe » ! Son ambition est toujours d’être accessible aux pilotes amateurs sans obliger à une débauche financière ou technique.
En tout cas c’est l’esprit du groupe N. 100% des voitures sont des voitures de série. Évidemment les choses sont un peu plus complexes, mais dès l’origine le principe était d’utiliser des voitures aussi proches que possible de la série, toujours dans ce souci de limiter les budgets. J’ai fait quelques podiums en seconde ou troisième place ce qui était encourageant. Alors en 2015 je suis passé à la Clio 3 CUP . Elle était dotée d’une boite séquentielle.

 

 

C’est important ?
Oui. – La boite séquentielle se commande par palettes au volant et permet un grande réactivité. La Clio 3 CUP a un comportement de karting, on joue sur l’ouverture du châssis en fonction des circuits. Une vraie voiture de course.

Et vous souhaitiez monter en gamme ?
C’est vrai. Notre ambition c’était le TTE, le Trophée Tourisme Endurance. Une compétition d’un niveau supérieur avec la présence de certain dirigeant du service compétition Renault Sport. Une bonne opportunité pour se faire remarquer. Mais posséder la voiture n’est pas suffisant. Même en étant attentif au budget, il faut aussi une logistique derrière. Et c’est en 2018 que le Team « 3C » nait.

Le team ?
Le sport automobile est prolixe en mot anglais. Le team c’est l’équipe. Et 3C c’est «
Cuynet-Compétition-Clio » . Une association constituée avec ma compagne Fabienne et notre fille Lucia. Objectif : nous faire connaître et aussi permettre à nos sponsors une défiscalisation.
En 2019, c’est avec cette équipe que nous nous engageons dans le TTE et je décroche le titre de vice- champion de France. Dans la foulée et après l’épisode covid je remplace ma Clio 3 CUP par une Clio 4 CUP turbo de 1600 cm3 issue de la coupe de marque Renault Sport. Les moteurs sont plombés pour éviter toute surpuissance et mettre les pilotes sur un pied d’égalité. Mais Chaque meeting à son lot de surprises. Ainsi à Dijon Prenois en juillet dernier, grâce à l’entraide, y compris celle de nos concurrents, nous avons pu changer le moteur dans la nuit sans cric ni palan et terminer le lendemain sur la plus
haute marche du podium, ceci sans aucun essais préalables. On l’a fait !!
Chaque course est une bagarre de tous les instants, mais c’est ce qu’on aime.
2022 ce seront 18 podiums sur 24. Des succès auxquels répondent les sponsors: des carrossiers constructeurs Lapalus à Mâcon, Carraz à Chambéry et Arnoux à Besançon et Dijon. Des équipementiers Berthier Renault trucks, également les assurances MMA Savarin et un pétrolier Petrobress. Le team a également su séduire des agences de communication, ID’graphic ou Lepeut publicité.

Et ces efforts aboutissent au titre de champion de France…
Oui. J’en suis fier et nous en sommes fiers. Notre détermination a payé jusqu’à la dernière course du dernier meeting sur le mythique circuit du Mans où j’ai pu accéder au titre de Champion de France.
Une belle année qui s’est clôturée avec des larmes de joie. Fier également pour le Jura. Convié en décembre dernier à Paris, pour la remise des prix organisée par la FFSA (Fédération Française du Sport Automobile), j’ai reçu le trophée aux côtés de l’élite du sport auto Pierre Gasly, Esteban Ocon, Jean Alesi pilotes de F1 et bien d’autres. Ma compagne et ma fille y ont aussi leur part.

Un jeune voudrait se lancer dans cette passion, quels conseils lui donneriez-vous ?
De s’acheter une voiture et d’aller se faire plaisir sur les circuits. Certains s’ouvrent aux amateurs le dimanche pour des approches loisirs, pas besoin de licence FFSA.

Après ça se gâte ?
Pour se lancer en compétition, c’est vrai, les budgets deviennent vite conséquents. Le plus gros poste de consommables est celui des pneus. Il en faut un choix adapté à la piste et à la météo. Au minimum 6 pneus par meeting. La Team 3C a la chance d’être aidé par la Maison du pneu Mariotte et Girardot pneus et c’est appréciable.

Courses, vitesse, pneus moteurs, voitures, camions, turbo… Dans notre société où le jansénisme écologique voue aux gémonies l’automobile, votre passion n’est-elle pas est une provocation ?
Non. Au contraire. La protection de l’environnement est une donnée incontournable à laquelle nous nous devons d’être encore plus attentifs que les autres, justement dans les disciplines sportives comme les nôtres, réputées polluantes. Le bruit est très sévèrement contrôlé. Tout concurrent dont la voiture passe le seuil des 100 décibels est impitoyablement recalé. Il faut aussi souligner que la compétition automobile tire vers le haut la technique. Si à l’heure d’aujourd’hui les voitures consomment moins, sont plus fiables, garantissent une meilleure sécurité elles le doivent au sport automobile car entre les marques c’est aussi une compétition, mais technique et intellectuelle.
2023, en route pour de nouvelles aventures sur les circuits !

P.R