Un regroupement opportuniste ?

Porté par la communauté de communes du Val d’Amour, le groupe scolaire de Mont-sous-Vaudrey concernera dix communes (Augerans, Bans, Belmont, La Loye, La Vieille-Loye, Montbarrey, Mont-sous-Vaudrey, Nevy-lès-Dole, Santans, Souvans), dont une hors du périmètre intercommunal. Le premier argument avancé par Étienne Rougeaux, président de la communauté de communes, est le contexte démographique avec une baisse très significative du nombre d’habitants et d’enfants scolarisés. Les possibilités semblent alors limitées : attendre que l’Éducation nationale ferme des classes ou anticiper…
Inscrit dans un schéma d’organisation travaillé depuis 2016, ce groupe scolaire s’insère dans une volonté initiale de créer 4 groupes scolaires. Aujourd’hui, confrontés au nombre d’élèves (moins de 700), la copie a été revue à trois groupes scolaires. Celui de Chamblay, faisant office d’exemple pour la communauté de communes, devrait donc être suivi de celui de Mont-sous-Vaudrey et celui de Mouchard.

 

Des opposants au projet manifestent leur mécontentement.

« Si l’école disparait, là, c’est sûr que la baisse démographique va se confirmer parce que plus personne ne viendra habiter dans nos villages », le collectif Eved.

 

La question démographique

« On la remet un peu en cause, notamment parce qu’on voit bien que nos villages redeviennent attractifs. Entre 2008 et 2019, La Loye [de 541 à 562], La Vieille-Loye [de 372 à 395], Augerans [de 143 à 181] ont une population qui augmente. Les chiffres datent de 2019, avant le covid. On se dit que le covid a aussi modifié les envies des gens et qu’il y a plus de gens qui viennent s’installer en ruralité. Si l’école disparait, là, c’est sûr que la baisse démographique va se confirmer parce que plus personne ne viendra habiter dans nos villages », avancent les opposants au projet réunis dans le collectif Eved créé en début d’année, avant de concéder ; « La démographie est valable effectivement dans certains villages des 10 concernés, mais pas dans tous ».
À ces arguments, Étienne Rougeaux rétorque : « Je m’inscris en faux là-dessus. On va vous présenter les chiffres. Il y a le fait qu’on ne puisse pas raisonner village par village. À l’échelle de la communauté de communes, on est sur 24 villages. Il y a une stratégie qu’on a commencé à bâtir en 2016. Il y a plein de villages dans le Val d’Amour qui aujourd’hui n’ont plus d’école au village, mais ils ont quand même une école. Alors, elle est intercommunale, oui, mais ils ont une école. Et ce n’est pas l’école qui fait la vie du village, mais les dynamiques qu’il y a autour : les dynamiques associatives, économiques… C’est la volonté que les gens ont de se retrouver, de créer des événements, y compris de créer des événements avec des enfants dans le cadre des parents d’élèves ou dans le cadre de la fête de l’école. La fête de l’école, on n’est pas obligé de la faire à l’école. On peut très bien la faire dans la salle des fêtes ou sur la place d’un village, pas forcément où est l’école ».

Un exemple révélateur

L’inspecteur de l’Éducation nationale présent à la présentation du début du mois dernier confirme : « Les classes ont été maintenues parce qu’il y a eu un vrai soutien ». Une convention ruralité a effectivement été signée pour travailler sereinement et éviter de se battre chaque année contre la fermeture de classes.
L’exemple de Chamblay est révélateur. Le groupe a ouvert ses portes en 2021 avec 204 élèves. Pour la rentrée de septembre, ils ne seront que 185 enfants.

Réunion de présentation du projet.

« La fête de l’école, on n’est pas obligé de la faire à l’école. », Étienne Rougeaux.

 

La qualité de vie des enfants

« On se dit qu’une grosse structure de 14 classes et de près de 330 élèves, ce n’est pas la bonne façon pour rentrer dans la vie à 3 ans », poursuivent les opposants, avant d’ajouter : « D’un point de vue écologique, ça nous semble aberrant de remettre tout le monde dans les bus, d’envoyer les enfants à dix kilomètres de chez eux. Ce n’est pas la raison pour laquelle les gens choisissent la ruralité ».
Face au temps de transport que les enfants feront, Étienne Rougeaux répond : « Les enfants de La Loye, oui. Ceux de Mont-sous-Vaudrey, non. Ceux de Santans, moins. Voilà, oui effectivement. Il y a un moment, il y a la dynamique intercommunale, on ne peut pas raisonner uniquement à sa chapelle ».
Certains avancent que des petites structures offriraient de meilleurs résultats. Est-ce que les équipements proposés dans le groupe scolaire compenseraient ?
Une chose est certaine, le choix de Mont-sous-Vaudrey est stratégique ; le village disposant d’une médiathèque, d’équipements sportifs, de commerces, etc.
À proximité du collège Jules Grévy, le groupe scolaire sera certes composé d’une école, mais aussi d’un accueil de loisirs et d’un espace de restauration. Selon un calendrier prévisionnel encore très flexible, le chantier démarrerait à la fin 2024. Une ouverture en 2026 ou 2027 serait donc possible.
Reste à évoquer le coût d’une telle opération, entre 5 et 7 millions d’euros d’après Étienne Rougeaux. En comparaison, le groupe scolaire de Chamblay avait coûté 3,4 millions d’euros hors taxes, dont plus de la moitié de subventions.

 

L’avis d’Étienne Rougeaux, président de la communauté de communes

Étienne Rougeaux.

« Ça nous permet d’éviter des fermetures de classes aujourd’hui, qui vont avoir lieu. Il y en a plusieurs qui étaient en suspens. On a permis de sauver ces fermetures de classes.
La deuxième chose, c’est d’arriver à avoir des conditions d’éducation qui soient de très bon niveau, renforcées par des moyens pédagogiques. Plutôt que d’avoir trois classes de même niveau à l’intérieur d’une même classe, on va avoir un niveau par classe. Ça permet aussi de travailler de manière plus efficace.
Troisième axe, le collège. On a un collège qui va nécessiter un certain nombre de travaux. Il me semble que d’avoir une logique économique entre le collège et le groupe scolaire, pour avoir du chauffage en commun, pour avoir une cantine en commun, pour avoir des infrastructures sportives en commun, ce n’est pas neutre. Ce serait possible de travailler avec le département ».

L’avis du collectif Eved « écoles et villages en danger »

« Nous sommes déterminés à nous opposer à ce projet […] parce que nous défendons une autre conception de l’aménagement du territoire et de la ruralité. Un village n’est pas destiné à devenir dortoir pour les péri-urbains. Parce que nous pensons à nos enfants qui seront anxieux d’entrer dans une école plus grande qu’un collège ».

 

L’avis d’Alain Dejeux

Seul maire concerné opposé au projet, Alain Dejeux, maire d’Augerans, explique son point de vue.

Alain Dejeux et sa première adjointe, Élisabeth Michaud.

« L’ensemble du conseil municipal, à l’unanimité, a voté contre le projet pour Mont-sous-Vaudrey parce que 330 gamins dans une même structure, c’est complètement débile. À côté, il y a encore un collège qui fait 300 enfants.
À Augerans, on a créé un lotissement. On a vendu des places à bâtir, on a un petit peu de locatif, et on a surtout attiré des gens dans notre village. Dans les premières questions, quand des couples de jeunes viennent acheter, c’est, est-ce qu’il y a une école ? Aujourd’hui, on veut tuer tout ça.
La majeure partie des parents d’élèves travaillent sur Dole. Il va falloir remettre des bus supplémentaires. Aujourd’hui, les transporteurs ne trouvent plus de conducteurs pour des fractions d’emploi ».