Marion Hawecker, artiste plumassière

De l’inspiration à la réalisation : la traversée de plusieurs mondes.

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Marion Hawecker, artiste plumassière.

Manon a suivi une formation de Haute Couture qui lui a permis d’apprendre le travail délicat, avec finesse. Elle aime le théâtre et est parfois amenée à faire des décors de scènes, des costumes et accessoires et cela lui plaît car c’est très créatif et différent à chaque fois. Elle précise  : « J’aime le détail, l’assez petit, ce que l’on retrouve en haute joaillerie d’art et ça, j’aime beaucoup. »

L’artiste plumassière, est à la croisée entre pratique artistique et savoir-faire artisanal, Marion Hawecker a fait de la plume d’oiseau son « compagnon » de prédilection. Elle explore cette matière en développant une production de sculptures, bas-reliefs et parures tout en finesse et délicatesse. Elle peut par exemple créer des fleurs mais en plume d’oie ou d’autruche.

Pour se faire, elle vagabonde entre les différentes approches artistiques et pratiques artisanales. Elle explore, taille, sculpte la plume d’oiseau au fil des besoins et projections artisanales qui traversent son esprit. Les rencontres nouvelles, les collaborations autour de projets variés allant de la création et de l’ennoblissement de textile, à l’installation paysagère et architecturale, la scénographie et le costume.

Hortus Allegoricus, 2018, installation paysagère et architecturale, festival des Jardins au Domaine de Chaumont sur Loire, plumes, fils nylon, tissu.

Un travail personnel dans un monde imaginaire

Passer du végétal à l’animal et réciproquement, rapprocher ou éviter de dissocier ces deux mondes sont le quotidien de Marion.
Faire
analogie, imiter le vivant, utiliser le trompe-l’œil, voilà ce que Marion aime pratiquer. Utiliser ou se servir de la symbiose possible entre les différents règnes sous une forme abstraite tout en laissant venir à soi, est ce côté artiste que développe Marion à partir des plumes, des peaux, des végétaux… et cela concerne son travail purement personnel de créatrice de l’imaginaire.

Oeuvre « Danaé et les pluvieuses » 2023, sculptures en plumes, cuir réemployé, perles, argiles.

En parallèle, Marion développe une production personnelle (sculptures, bas-reliefs, bijoux..). Son travail interroge le concept de « Nature », le rapport au vivant non-humain et son environnement. Qu’il soit d’ordre élémentaire, minéral, animal ou végétal, Marion observe le lien qu’elle entretient avec lui et comment elle le perçoit à travers ses sensations, ses ressentis et ses projections possibles. Elle tente de tisser des liens entre ces mondes par imitation, mimétisme du monde animal et végétal, analogies de formes et évocations silencieuses. La plume ne se fait pas entendre, elle vole, tombe et se pose en silence. Créer l’unité du vivant en lien avec les éléments indissociables.

« Créer c’est aussi montrer un objet qui vit, un élan vital qui anime. C’est imaginer l’hybridation pour continuer de vivre de nouvelles formes de vie qui résistent à tout. »

Trouver les matières et les faire vivre

Pour se procurer les matières, Marion se rend en ressourceries ou recycleries mais elle reçoit aussi des dons ou ramasse des plumes ou autres objets elle-même. Une fois récoltées, les plumes sont mises au congélateur quelques temps pour les assainir puis stockées dans des boites hermétiques avec des huiles essentielles pour éviter les mites. L’utilisation des plumes est réglementée et doit être conforme au répertoire des espèces autorisées. Les plumes arrivant d’ailleurs passent les douanes après avoir subies un contrôle vétérinaire…
Celles-ci sont majoritairement importées car il n’y a plus de producteurs de plumes en France.
« Avant il y avait des besoins pour les oreillers, les édredons et les chapeaux mais aujourd’hui cela est perdu. Seulement quelques artistes travaillent la plume pour faire des chapeaux, des coiffes, des accessoires (sacs à main, chaussures, vêtements…) pour la haute couture et la scène. »

Les Métamorphoses, 2020-2022, série de sculptures en plumes, plâtre et argile.

Concernant le déroulé, il faut d’abord trier les plumes à la lumière afin de voir les reflets et les classer par couleur. Puis elles sont découpées à la forme souhaitée « c’est un temps de préparation très long car chaque plume est différente et il faut parfois plusieurs heures pour trouver la bonne plume. » Ensuite les plumes sont collées ou cousues sur le support choisi. Ce dernier peut être en plâtre, en carton, en textile, en cuir, métallique, en bois ou tout autre matière naturelle. Dans tous les cas, il sera choisi en lien avec la réalisation finale. Les plumes peuvent se superposer lorsqu’il s’agit de la technique à plat. Certaines plumes sont naturelles et d’autres ont été teintées, avec des teintures végétales, ce qui change l’irisation et donne de nouvelles tonalités. 

Matières diverses dont les plumes.
Les cailloux aussi ont leurs secrets, Carré n°3, 2023, bas reliefs papier et plumes, 25x25cm.

Inspirations et créations de petite ou grande envergure

Marion peut être amenée à créer des œuvres plus grandes comme un travail dans l’espace à l’extérieur même si dans ce cas là les œuvres restent éphémères car la plume vit mal l’extérieur. Mais ce qui est intéressant ici ce sont les jeux de lumière permanents qui apportent un regard différent selon les moments de la journée.

Ce métier de plumassière est aussi un travail d’architecte et il rejoint, de fait, les études d’architecture que Marion a fait. Elle ressentait ce besoin de travailler à la main, de faire des études d’arts appliqués. Créer avec les plumes a été une véritable révélation, un coup de cœur, une évidence. Du coup Marion s’est renseignée sur les études possibles et, en 2015, elle a intégré Le Lycée Octave Feuillet à Paris en alternance pendant deux ans afin d’apprendre le métier de plumassière. Elle a ensuite travaillé un an dans l’atelier Lemarié qui l’avait accueillie où elle a pu recevoir de véritables savoir-faire grâce à une équipe aimant transmettre, dans une ambiance d’entraide.

Quand Marion dessine les croquis de ces œuvres à venir elle le vit comme « un travail libérateur par rapport à l’architecture ». La création des œuvres est pensée en respectant la phyllotaxie, c’est à dire l’ordre dans lequel sont implantés les plumes comme le sont les feuilles, les fleurs, les rameaux dans la nature.

« Sao », 2022, sculpture en plumes et argiles.

Les demandes associées à son imagination permanente font que les réalisations sont variées . Les commandes émanent de particuliers, de la Haute Couture, du Théâtre ou de l’Opéra, de Vitrines de luxe, de designers… Pour le reste ce sont des inspirations personnelles.

Afin de travailler dans un atelier plus spacieux, en septembre 2023, Marion s installe dans un atelier partagé à Dole, rue Poitelin avec 5 autres artistes et artisanes.

Des prix, des expositions régulières

« Mouche! », série New Moon, 2021, broches, bagues et boucles d’oreilles en plume d’autruche et laiton martelé, collaboration avec Aliska bronziere d’art.

Marion a obtenu un prix, celui de Lauréate du prix Jeune Création Métiers d’Art 2021 des Ateliers d’Art de France. Elle est membre de la Pépinière Ateliers d’Art de France depuis 2019 et aussi membre des Ennoblisseurs depuis 2021.

Elle participe régulièrement à des expositions et salons dont la Galerie Collection à Paris 3è (2022/2023), l’exposition « A la française » Grassimesse au Grassimuseum de Leipzig en Allemagne (2022), le salon de la Société Nationale des Beaux Arts – Jardin du Luxembourg à Paris (2022), la Révélation/Biennale Internationale des Métiers d’Art et Création au Grand Palais à Paris (2022), les Journées Européennes des Métiers d’Art à la Préfecture du Jura à Lons Le Saunier (2022), l’Exposition « Éclosions » Galerie Boutique à Salins Les Bains (2022), la Biennale de Métiers d’Art « De mains de maîtres » au Luxembourg (2021).
L’inspiration fuse et la création suit, le tout dans l’évocation du vivant.

Contact : atelier@marionhawecker.comwww.marionhawecker.com – 06 65 56 98 03