De l’eau pour demain : enjeux et besoins

Tout ce que l’on fait sans y penser, boire, laver, cuisiner, se baigner….dépend de l’eau. La problématique du changement climatique pose un défi aux services d’eau potable et nécessite de prendre des mesures concrètes pour le relever. Si le Jura jouit depuis longtemps d’une eau de qualité, les années de sécheresse dont la dernière en 2020 ont été fortement ressenties provoquant localement des difficultés d’approvisionnement. Il est indispensable de préserver ce bien commun pour les générations futures.

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Histoire de l’eau courante en France

En France, jusqu’au 18ème siècle, l’eau à domicile était le privilège réservé aux palais, aux hôpitaux, aux abbayes et aux couvents. Pour majorité de la population, il y avait les fontaines publiques, l’eau des rivières ou des puits. Vers 1750, il y avait jusqu’à 2000 porteurs d’eau à Paris qui représentaient une corporation puissante. De plus l’eau n’était pas de qualité, ce qui occasionnait des maladies et des épidémies, cause d’une très forte mortalité.
Ce n’est que vers le milieu du 19ème siècle que naquirent les premières sociétés de distribution d’eau potable. A partir de 1880, l’essor de la microbiologie ouvre une nouvelle ère dans l’approche de l’alimentation en eau potable. La loi de 1902 sur la santé publique instaurera de nombreuses mesures inspirées par les hygiénistes. Malgré cela, en 1930, seulement 23% des communes possèdent un système de distribution d’eau à domicile. En 1945, 75% des communes ne sont toujours pas desservies.

Un puits du captage de Villevieux.

L’eau potable dans le Jura, état des lieux

Le Jura est un département dont une grande partie est constitué par un sous-sol calcaire, fortement fracturé et contenant de nombreuses cavités propices aux écoulements souterrains des eaux. L’existence du modèle karstique explique la très grande sensibilité des eaux souterraines aux activités humaines. Le Jura possède un nombre important de ressources soit 321 captages. Des ressources abondantes, soit 26 millions de m3 sont prélevés tous les ans pour une consommation moyenne de 130l/jour/habitant. De nombreux gestionnaires de petite taille, 198 unités de gestion (syndicats et communes) sont responsables de la gestion de l’eau potable. Par contre, les pertes en eau dues à la vétusté des canalisations sont en moyenne de 24%, chiffre supérieur à la moyenne nationale.

Les pompes en action.

Histoire d’une eau anciennement polluée

il est intéressant de voir comment on peut lutter contre la montée régulière des pollutions avec l’exemple de la nappe de Villevieux. Jusqu’en 1961, l’alimentation en eau potable était faite seulement à partir du captage partiel de 6 sources. A partir de 1961, une nouvelle ressource est exploitée, celle de la nappe phréatique de la Seille, sur la commune de Villevieux. Entre 1985 et 1989, les services techniques s’inquiètent de la montée régulière des pollutions par des nitrates, les pics vont jusqu’à 40 mg/l.
C’est en 1992 qu’un partenariat débute avec les agriculteurs, des conventions agricoles sont mises en place. Elles concernent environ 70 hectares et touchent 15 agriculteurs. Le principe de ces conventions est de verser une indemnité aux exploitants en contrepartie de pratiques agricoles adaptées à l’environnement des captages. Plus tard, en 2001 les agriculteurs sont invités à convertir leurs sols  à l’agriculture biologique. Depuis le passage au bio, et la mise en place des prairies sur les périmètres rapprochés, la concentration en nitrate passe de 25mg/l à 15mg/l en 2014.

La station de Villevieux.

Disposer de l’eau en quantité suffisante pour satisfaire les besoins

Les conditions hydrologiques et climatiques du département fournissent des volumes suffisants pour assurer les besoins moyens domestiques. Toutefois, quelques unités manquent ponctuellement d’eau en période de demande maximum. Le fait est que la consommation annuelle moyenne baisse de -1,2% depuis plusieurs années grâce à l’incitation aux économies d’eau pour préserver les ressources.
Or, les niveaux des nappes phréatiques sont bas. Les arrêtés de sécheresse surviennent de plus en plus tôt, le 26 juin cette année. En 2020 par exemple, on a failli manquer d’eau sur l’agglomération de Lons le Saunier. Si la quantité pose problème, la qualité elle présente plusieurs facettes, c’est pourquoi la qualité des eaux destinées à l’alimentation en eau potable, en vue de la protection de la santé humaine est suivie en protégeant les captages et les ressources par l’Agence Régionale de Santé Bourgogne-Franche-Comté

La fontaine de Montciel.

Économiser l’eau plutôt qu’épuiser les ressources

la nécessité de prendre des mesures concrètes face au désordre climatique avec la raréfaction des ressources en eau potable devient un enjeu politique de recours à la participation citoyenne. Un effort de communication doit être fait pour expliquer les limites du système. L’agglomération de Lons le Saunier a d’ailleurs lancé une enquête citoyenne afin de recueillir les attentes des habitants afin de donner la possibilité aux acteurs du territoire d’être force de proposition en terme de gestion et de préservation de la ressource en eau. Cette enquête qui se terminera fin décembre doit permettre d’éclairer et enrichir les décisions des élus sur des actions concrètes à mettre en place.
A partir de cette enquête, les élus de la Régie Eau d’ECLA vont dans un second temps accompagner des groupes de citoyens volontaires pour imaginer des solutions, anticiper un quotidien avec une eau toujours plus rare.

La fontaine de Montciel.

Des travaux nécessaires, mais couteux !

L’urgence est de réhabiliter les réseaux de près de 60 unités dont le rendement n’atteint pas le seuil réglementaire ou qui ont des performances médiocres. Les besoins d’investissement liés au renouvellement des ouvrages sont évalués à 21 millions par an et représentent un impact moyen de 1,3 euro par m3 consommé. Le «juste prix moyen » du service d’eau potable est estimé à 2,4 euros/m3 ht et hors redevance. Il est vrai que les plus petites unités ne pourront faire face à ces enjeux dans le cadre d’un prix de l’eau acceptable qui atteindrait 2 à 10 fois le prix moyen. De fortes disparités montrent la limite du système actuel avec d’un côté 10 « unités ville » (impact des investissements nécessaires acceptables pour le consommateur) et de l’autre pour les unités dites rurales un impact beaucoup trop élevé.
Une dégradation de leur patrimoine est donc à craindre, d’où la nécessité de développer des stratégies d’intervention plus globales pour anticiper et pallier aux difficultés à venir des petites unités de gestion. La mutualisation des moyens par une organisation territoriale adaptée et une solidarité entre territoires urbains et ruraux permettrait de développer une ingénierie territoriale performante en travaillant à une échelle pertinente. Parallèlement, le subventionnement des travaux par le département du Jura et l’Agence de l’eau participerait à cette solidarité territoriale.

Le château d’eau de Pymont.

Anticiper le quotidien avec une eau de plus en plus rare

Économiser, optimiser, préserver l’eau est une réponse au dérèglement climatique mais aussi le moyen de réduire sa facture car si l’eau est une ressource naturelle, sa distribution et son traitement ont un coût. Pour réduire sa consommation, il y a un éventail d’éco-gestes qui permettent de préserver au quotidien cette denrée si précieuse. Gestes que tout le monde connaît mais que l’on n’applique pas toujours. Par exemple, 100L, c’est l’écart de consommation d’eau entre une douche rapide et un bain.
Il faut savoir que l’eau potable n’est utilisée qu’à 2% en tant que boisson. Pour économiser l’eau du robinet, substituez la par de l’eau de pluie pour d’autres fonctions quand c’est possible. Il suffit pour cela de procéder à l’installation de récupérateurs d’eau de pluie qui serviront notamment pour l’entretien du jardin. Tous concernés, tous solidaires.