Corinne, comment êtes-vous arrivée à la tête de la Commanderie ?
En 2016, je suis arrivée dans une confrérie un peu en sommeil, après avoir connu de belles décennies. Quelques piliers voulaient la réveiller. Il fallait retisser les liens, fédérer autour d’un projet commun, faire table rase des dissensions passées. C’est une tâche à laquelle s’est attelé Jean-Louis Mussillon, alors président de la Commanderie. Son idée : ajouter une pincée d’humour… et faire entrer une femme, la première femme de la Commanderie. C’est comme ça que mon nom est arrivé. Je suis devenue vice-présidente du CIVJ et on a remis la confrérie en mouvement. Le décès brutal de Jean-Louis a tout bouleversé. Reprendre le flambeau, aujourd’hui, en tant que présidente, c’est une manière d’honorer ce qu’il a relancé avec passion.
Quelle est la mission de la Commanderie aujourd’hui ?
Elle est double : défendre et promouvoir deux emblèmes AOC du Jura, le Vin et le Comté. Pas dans un but commercial, mais pour transmettre, faire rayonner un terroir, une histoire, des savoir-faire. On a un rôle d’animation culturelle et patrimoniale. Être intronisé, c’est devenir un ambassadeur de cœur et d’esprit. J’aimerais que chacun de nos intronisés, une ou deux fois par an, nous envoie un signe, une photo, un moment partagé autour d’un verre de vin du Jura et un morceau de Comté pour nous dire qu’on a raison de continuer. Chaque intronisé doit avoir un sentiment d’appartenance, c’est essentiel.
Quels projets portez-vous avec votre équipe ?
Je ne veux pas être une présidente autoritaire mais plutôt une cheffe d’orchestre. Nous avons donc mis en place un bureau élargi, des commissions, des binômes afin d’alléger les tâches pour que chacun trouve sa place.
Dans l’immédiat, nous préparons le prochain chapitre des vendanges qui aura lieu comme chaque année en octobre. Cela demande toujours beaucoup de temps et une organisation au cordeau et au millimètre. L’année 2026 marquera les 60 ans de la Commanderie. Nous voulons marquer cet anniversaire dans un lieu emblématique du Jura, que ce jour soit à la hauteur de notre histoire. Et puis, j’espère faire revivre au printemps un deuxième chapitre que j’aimerais appeler « le chapitre des jeunes pousses ». Ce projet est à valider par mes collègues, je ne prendrai pas de décision dictatoriale, mais je le défendrai.
Comment attirer les jeunes générations ?
C’est l’enjeu majeur. Aujourd’hui, les jeunes sont déjà très sollicités par les événements viticoles, la Percée du Vin Jaune notamment. Il faut comprendre leurs attentes, peut-être sortir des codes, tout en restant fidèles à nos valeurs. Je crois que la convivialité, le lien au territoire et la fierté d’un patrimoine sont des leviers puissants. Il ne tient qu’à nous de les activer différemment.
Trois mots pour résumer la Commanderie ?
Patrimoine, transmission, convivialité.
Corinne Décoté Saillard, l’élégance de la polyvalence. Cette Arboisienne issue d’une famille de viticulteurs, ancienne professeure d’anglais, s’est depuis longtemps tournée vers le monde du vin. Aujourd’hui directrice commerciale à la Maison du Vigneron à Crançot, elle conjugue également son expertise professionnelle au sein du CIVJ, où elle pilote la communication presse et l’œnotourisme. Ambassadrice de la Commanderie depuis 2018, elle est également décorée du Mérite Agricole depuis janvier 2023.