
Quoi de mieux que la filière comté et son organisation solidaire pour défendre la singularité de l’agriculture française sur la scène européenne, qui doit s’entendre sur la Politique Agricole Commune (PAC) ? C’est en tout cas à la Maison du Comté, à Poligny, bâtiment emblématique et fort instructif, où le ministre délégué à l’Europe, Benjamin Haddad accompagné de Piotr Serafin, commissaire européen du budget, se sont rendus ce vendredi 23 mai pour leur seconde partie de journée franc-comtoise, après avoir visité en matinée les locaux de l’entreprise Exail à Besançon.
Annie Genevard rejoint la visite
Cela n’était pas prévu dans l’agenda de départ, mais les deux hommes ont été rejoints à la Maison du Comté, par la ministre de l’agriculture, Annie Genevard. Sur ses terres franc-comtoises, l’ancienne maire de Morteau a regagné la visite des lieux, assurée par Alain Mathieu, président de l’interprofession du comté. “La filière comté est enviée dans toute la France“, a lancé le maire de Poligny, Dominique Bonnet, rallié par l’ensemble des professionnels, fiers de montrer leur savoir-faire ancestral après que leur fromage à pâte pressée ait fait l’objet d’une polémique propagée à la suite d’une chronique radiophonique.
Alain Mathieu a insisté sur la limitation de la grandeur des exploitations pour garder des fermes à taille humaine. “Nous avons eu à faire face à une demande importante et nous adaptons la production aux besoins, tout en régulant pour garantir la qualité.”
Un procès injuste
Face à la polémique, Annie Genevard a défendu avec force la filière comté : “Vous savez, il y a quelques années cette filière a fait l’objet d’une évaluation de WWF qui n’est pas connue pour être particulièrement complaisante et cette dernière a conclu que le comté était un fromage particulièrement vertueux, dans le respect qu’il a pour l’environnement. Je considère que, agriculture et environnement ne peuvent pas s’opposer, parce que les agriculteurs travaillent au quotidien avec la nature. Lorsque qu’une rivière est polluée, il faut selon moi, interroger tous les acteurs, d’autres facteurs entrent en jeu. Le réchauffement climatique et l’activité humaine dans toutes ses dimensions peuvent être source de pollution. Je trouve particulièrement injuste le fait de stigmatiser l’activité agricole !”, explique la ministre.
Des arguments qui pèsent face aux critiques
Annie Genevard a accentué son propos sur la caractéristique de la filière : “Le comté est un produit magnifique, qui a fait l’objet de recherches pointues dans les deux écoles nationales d’où provient son amélioration gustative. La filière construit une chaîne de valeur sur le territoire où sont solidaires le producteur, l’affineur et le consommateur. C’est fondamental ! Elle garantit également un renouvellement des générations, avec pour chaque agriculteur qui prend sa retraite, un jeune qui reprend, avec la garantie d’une source de revenu stable.”
Politique Agricole Commune (PAC) : quelle place pour la France, le premier pays agricole européen ?
Alors que les négociations sur le prochain budget européen vont commencer, la Politique Agricole Commune (PAC) se dresse comme le prochain grand enjeu pour le monde agricole français, le premier en Europe. En présence du commissaire européen Piotr Serafin, les deux membres du gouvernement, Benjamin Haddad et Annie Genevard ont voulu rassurer : “Face à la concurrence des Chinois et des Américains, l’Europe a besoin d’investir sur le plan technologique, mais aussi de défendre ceux qui nous nourrissent. Si nous sommes ici, c’est pour appeler à une PAC ambitieuse qui préservera les revenus de nos agriculteurs et la souveraineté alimentaire de notre continent, pour faire face à la concurrence parfois déloyale à travers le monde“, a indiqué Benjamin Haddad.
De son côté, Annie Genevard s’est dite très attachée à ce que le budget réponde aux besoins de l’agriculture française. “Nous voulons un budget automne, suffisant et commun. Heureusement tous les ministres de l’agriculture européenne partagent cet avis. Nous voulons défendre une PAC adaptée aux revenus des agriculteurs et simplifiée, qui sera un soutien de la vie rurale en lien avec l’aménagement du territoire.” Question budget, la ministre a rappelé que 10 milliards d’euros seront affectés à l’agriculture. “C’est considérable !”
Enzo Saad