Messia Parking des bus de Chantrans, 7 heures du soir. Une voiture de police se rapproche
discrètement d’un homme. Il est accroupi, visiblement occupé par un enchevêtrement complexe de tuyauteries entourant une tubulure et assujetties à un châssis.
Puis soudain une flamme et un sifflement qui montent en puissance et vrillent les tympans. Réalisant la présence des policiers, l’homme interrompt l’activité de l’engin dont le bruit s’éteint dans un long feulement. Comprenant qu’ils ne sont pas en présence d’un dangereux terroriste ceux-ci s’approchent, intrigués.
L’homme aux commandes de l’objet c’est Paul Savoye. Figure jurassienne connue de l’aéromodélisme, il est également considéré comme particulièrement talentueux dans les milieux de la micromécanique de haute précision.
Le brigadier explique :
« Nous avons été prévenus qu’un hélicoptère avait atterrit sur le parking ! ».
Au cœur du réacteur…
L’hélicoptère n’est pas là, mais en effet, c’est bien son réacteur, que Paul testait. Un directeur du centre commercial en avait reconnu le bruit très caractéristique et avait alerté la police. L’auteur de ces émois s’inquiète : est-ce interdit ? Pas vraiment : Bruyant, certes, mais le voisinage est loin, et la loi ne n’interdit pas cet usage il est vrai inhabituel, d’un parking public.
Tout de même, un policier, manifestement connaisseur, s’étonne :
« Ôtez-moi d’un doute, ce réacteur, ce n’est tout de même pas vous qui l’avez construit ? »
Eh bien si justement. En général les amateurs de modèle réduits achètent au moins le moteur. Paul fabrique tout. Et concevoir puis réaliser un réacteur fonctionnel n’est pas à la portée du premier venu : c’est être capable de souder des alliages d’aluminium, travailler l’inox réfractaire pour résister à des températures de 1200° , être hyper précis notamment sur les équilibrages.
« … Autant de défis, mais c’est ce que j’aime ! »
« Stimulant et proche de la démarche artistique… »
Défi ! Le mot est lâché.
Après des études techniques, Paul Savoye s’est spécialisé en micromécanique, d’abord en horlogerie chez ODO puis en lunetterie haut de gamme chez Julien.
« J’avais la responsabilité de l’atelier création. Pour les salons, Il fallait sans arrêt être réactif pour apporter des solutions à des trucs impossibles dans des délais impossibles. Je trouvais ça très stimulant et sans doute assez proches de la démarche artistique. Il s’agit dans tous les cas de créer depuis une idée, donc de savoir mobiliser l’imagination ».
Mais pourquoi les hélicoptères ?
« Natif d’Arbois, je me suis intéressé très tôt à tout ce qui volait. J’étais fasciné par les hélicoptères qui traitent les vignes. Je passais des heures à voir évoluer ces merveilleuses machines. Trop près même : je me suis une fois retrouvé vert de la tête aux pieds ! Je m’étais alors promis de reproduire cette technologie précisément parce qu’elle était complexe. J’y trouvais à la fois le plaisir de l’aéronautique et l’obsession de la mécanique. L’hélicoptère est le support qui me permet de pousser les défis techniques et en plus qui me fait rêver. Je fais partie du Club Modéliste Lédonien mais la plupart des
pilotes font voler des avions. En aéromodélisme l’hélicoptère est un domaine très spécial. Nous ne sommes que trois ou quatre, mais à ma connaissance, je n’en connais pas d’autres qui ai conçu et réalisé de A à Z un turboréacteur fonctionnel ». Et comme tous les pionniers, sa passion n’est pas sans risque : avec humour et peut-être une pointe de fierté, il se targue d’avoir eu un accident… d’hélicoptère !
Tours, fraises, plieuses, mais aussi un pantographe et une rectifieuse
« Lors d’une démonstration, le rotor n’était pas complétement arrêté et m’a déchiré la jambe ! » Et pour cause : Le rotor d’un hélicoptère tourne à 300 tours/minute. Mais plus c’est petit, plus ça doit tourner vite !
« A mon échelle du 1 /5, ce seront 1700 à 2000 tours. Quant au réacteur, la turbine doit supporter 200 000 tours/minute. Les exigences sont conséquentes : équilibrage, graissage, refroidissement des paliers, qualité des surfaces, dureté des matériaux… » Alors, même si Paul est adroit, sa passion ne peut se passer d’outillage et de machines.
Dans son atelier de 60 m² s’alignent tours, fraises, plieuses, mais aussi un pantographe et une rectifieuse.
Paul Savoye, toujours en pleine effervescence créatrice travaille actuellement sur la réalisation d’un compresseur à plusieurs étages. Son idée c’est un nouveau système de pales auto propulsives qui n’existe pas et qu’il a entièrement imaginé.
Alors ne vous étonnez pas si la nuit vous entendez encore des bruits inconnus sur des parkings déserts : Paul expérimente !
Club Modélisme Lédonien 15 Av. du Stade Municipal 39000 Lons Le Saunier
Site internet: http://lonsmodelclub.jimdofree.com
Président: Sébastien Boissenet
Personnes à contacter pour renseignements :
Maxime Nouvelot: maxime.nouvelot@outlook.com
Stéphane Nouvelot: 06 27 55 57 91