Dans « Le Président », film culte d’Henri Verneuil de 1961, Jean Gabin a cette réplique célèbre « Nous ne parlons forcément pas de la même Europe ! ». Invective fameuse au point d’avoir intégré le générique d’une émission qui évoque chaque semaine les tribulations et vicissitudes de notre bien vieux continent. Il est vrai qu’il y a tant d’Europe de Nouméa au Groenland et des Antilles aux Açores que les boussoles les mieux étalonnées en perdent le Nord !
Le renoncement de l’Angleterre, un jour de Brexit, a brouillé un peu plus encore les cartes de géographie.
Aujourd’hui nos pêcheurs luttent contre vents et marées pour faire vivre leurs filets vers Jersey et Guernesey. Âpre révolte et combien difficile quand la raie a soudain basculé de l’autre côté du pointillé de nos frontières. Et quand la coquille Saint-Jacques, devenue scallop shell, fait un bras d’honneur à nos marins. Voilà que le homard se sent une âme de lobster au point de faire bisquer la sauce armoricaine.
La potion magique d’Astérix contient des fleurs des bois et des trèfles à quatre feuilles. Mais pas que ! On sait qu’une pincée de homard est indispensable pour le goût, du gui pour porter bonheur et « du poisson raisonnablement frais » pour ne pas décevoir des gourmets devenus exigeants après le succès des premiers albums.
Ce Brexit fait trop parler et aujourd’hui la coupe est pleine. Je parle bien sûr de la Coupe d’Europe. Imagine-t-on un seul instant les footballeurs de Manchester, de Liverpool ou de Chelsea venir se mesurer encore à nos clubs si authentiquement européens en bafouant leur propre Brexit ? Ce serait pire qu’un fameux toupet. Au pays des brouillards tamisés ce serait un crime de lèse-majesté. Et la Reine qu’on dit affaiblie s’en remettrait elle ?