Covid : la revanche des cafés hôtels restaurants

Grâce aux perfusions étatiques, le secteur –à la faveur de l’été- se tire plutôt bien du marasme économico-sanitaire sur le plan financier, malgré une hémorragie de personnel qui obère son avenir. Explications.

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Les terrasses vides ne sont plus qu'un lointain (mauvais) souvenir.

Fermetures administratives, re-fermetures, jauges, passe sanitaire : rien n’aura été épargné aux cafés, hôtels, restaurants depuis début 2020. Longtemps victime expiatoire numéro une de la pandémie sanitaire, le secteur a connu une véritable hémorragie de ressources humaines. Selon les statistiques du ministère du Travail, 237.000 employés ont quitté le navire entre février 2020 et février 2021 : les employés ont fondu de 1,309 million à 1,072 million, alors que le secteur gagnait des dizaines de milliers d’emplois par an avant la pandémie. Emmanuel Macron lui-même, a indiqué que 110.000 emplois étaient à pourvoir dans le secteur en proposant de défiscaliser leurs pourboires.
Un chiffre que les organisations patronales estiment plutôt supérieur à 150.000 emplois : les exemples d’établissements à moitié fermés, ou manquant de serveur ou de cuisinier sont en effet légions. C’est ainsi que « trois salariés sur dix travaillent dans des entreprises qui signalent un manque de personnel » indique le ministère du travail, ce qui implique davantage de pression et de polyvalence pour les salariés restants… Il faut dire que les contraintes horaires s’avèrent aussi lourdes que les salaires minces.
Conscients de ces défauts, des professionnels s’adaptent en réduisant les horaires de service, ou en octroyant un week-end sur deux aux équipes, tandis que l’UMIH a mis en place une plateforme spéciale de recrutement.

Une possible « surcompensation » des pertes ?

Mais les CHR ont malgré tout un atout dans leur manche, à savoir une situation financière meilleure que l’on aurait pu le croire. Ce constat, c’est le Conseil d’analyse économique (CAE) qui le dresse dans son dernier rapport : selon lui, « moins de 5% des entreprises se trouvent en grande difficulté », alors qu’à contrario environ 12 % des entreprises se trouvent en « très bonne santé ». Et le cash ne manque pas : en novembre 2019, ils étaient environ 25% dans une situation financière « bonne ou très bonne » ; après le Covid, en aout 2021, ils sont environ le double, soit 50%. Comment expliquer ce paradoxe ? Il tient d’abord en trois lettres : PGE (prêt garanti par l’Etat), un prêt auquel les entreprises du secteur ont eu massivement recours.
Globalement, le CAE n’hésite donc pas à évoquer « une possible surcompensation de la baisse de leur excédent brut d’exploitation ». Une abondance également soulignée par la Cour des comptes pour le secteur de la culture (lire encadré), mais qui ne masque pas les épées de Damoclès qui pèsent sur ces acteurs économique dans les mois à venir, à mesure que l’Etat providence retire ses remèdes de cheval aux patients atteints de plein fouet par la crise covidienne.

Stéphane Hovaere.

Certains acteurs culturels également favorisés

Connue pour ses rapports parfois accablants, la Cour des comptes a une fois de plus mis les pieds dans le plat en évaluant les aides apportées à la culture. D’après elle, le niveau de ses aides a atteint  823 millions de crédits exceptionnels au 15 mai 2021, qui se sont ajoutés à l’année blanche consentie aux intermittents du spectacle et aux dispositifs du régime général d’aide, chiffrés à plus de 1,2 milliard d’euros (exonérations de charges, chômage partiel, etc…).
A lui seul, le cinéma remporte la palme d’or des soutiens, avec par exemple 405 millions d’euros pour le CNC (Centre national du cinéma et de l’image animée), et 51,6 millions pour l’IFCIC (Institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles). Mais ce qui fait tousser la haute juridiction relève plutôt de « l’absence des mesures de contrôle ou d’évaluation permettant de garantir que les professionnels n’aient pas bénéficié d’une surcompensation de leurs pertes ».
Si les acteurs privés n’ont guère eu le loisir de profiter de leurs salles fermées, de gros acteurs publics ont bénéficié à plein du « quoi qu’il en coûte », comme par exemple Le Louvre, le château de Versailles, le Centre des monuments nationaux, le Grand Palais le musée d’Orsay, etc.