L’invitée de la rédaction : Florence Torrollion

L'auteure, psychopraticienne et conférencière, vient de sortir un deuxième opus expliquant comment se reconstruire pour parvenir à vivre sa deuxième vie, après des violences subies.

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Florence Torrollion, victime de violences conjugales et d'une tentative de féminicide, photographiée à son cabinet de Psychopratricienne. Saint-Brieuc jeudi 05 janvier 2023.

Florence Torrollion, pouvez-vous vous présenter en quelques phrases pour les lecteurs qui ne vous connaissent pas…

Florence Torrollion, psychopraticienne, autrice de « Ma Mort dans ses yeux » aux éditions Horsains et de « Je ne suis pas qu’une cicatrice ». Conférencière sur le sujet des violences intra familiales et militante. Ex-victime d’une tentative de féminicide en mai 2014 (bientôt 10 ans et pourtant). Je suis née à Saint-Claude dans le Jura.
Après avoir vécu 20 ans avec un homme violent et avoir vécu une tentative de féminicide, je mets des années à me reconstruire et à vivre ma deuxième vie comme j’aime le rappeler. Quand on ressort d’une telle expérience, la vie d’après ne peut plus être la même…

Vous êtes intervenue ces derniers mois dans différentes communes du Jura. Quels ont été les moments forts ?

Les moments forts quand j’interviens y compris dans le Jura resteront toujours ceux où je suis face à des lycéennes/lycéens (ce sont nos graines, nos adultes de demain) car j’accorde non seulement un réel plaisir mais aussi un devoir de les sensibiliser sur le sujet des violences intra familiales.
Il n’est pas rare que des jeunes me recontactent après l’intervention pour me dire qu’ils ont déjà un vécu des violences, soit pour des très jeunes couples, soit au sein de leurs familles.
Mais le moment le plus fort que j’ai vécu jusqu’à aujourd’hui est mon intervention auprès des policiers du commissariat de Dijon. Commissariat où en tant que victime, j’ai été mise dehors deux fois. Malgré les tentatives de féminicides que j’avais vécues. Donc revenir en tant qu’intervenante était un joli « pied de nez » à mon histoire.
Je dois d’ailleurs faire une nouvelle intervention et immersion avec les policiers du commissariat de Dijon prochainement.
J’interviens aussi auprès des gendarmes, surtout dans les MPF (Maisons de protection des familles). Tout un symbole pour moi.
Car si les victimes sont mieux écoutées et entendues, nous pourrons avancer et protéger car elles oseront de nouveau pousser la porte.

Vous étiez notamment venue présenter votre premier livre. Un second opus vient de paraître. Pouvez-vous nous le présenter ?


Pourquoi, un deuxième opus… C’est à la lecture du premier « Ma mort dans ses yeux » que les lectrices et lecteurs sont venus me dire : « Ok mais avec tout ce que tu fais, tu dois bien avoir des choses à dire. Effectivement, dans « Je ne suis pas qu’une cicatrice », je relève ce qui est de la vie d’après. C’est plus la thérapeute et la conférencière qui parle.
Je parle de l’impact des violences intra familiales, de violence institutionnelle, ainsi que des enfants des victimes trop souvent oubliés encore aujourd’hui. De mes rencontres politiques aussi et comment « porter la parole des victimes ».
Lutter contre les violences est un combat de chaque jour, c’est un sujet sociétal auquel chacune et chacun doit contribuer.

Vous êtes entendue jusque dans les hauts-lieux du pays. Quelques jours après le 8 mars, les droits des femmes vous semblent-ils progresser ?

Après un Grenelle et une grande cause du gouvernement, nous sommes encore bien loin d’avoir les moyens de protéger les victimes et les enfants de victimes. C’est une volonté gouvernementale qui est à mon sens bien loin des promesses, si nous prenons exemple sur nos pays voisins comme l’Espagne et d’autres pays.
J’ai rencontré pour le 25 novembre la ministre Egalité Hommes/Femmes Bérangère Coulliard. Je lui ai relevé le retard de la France, où cela ne faisait que trois années que le sujet était sur la table, alors qu’en Espagne cela faisait sept années.
Bérangère Couillard n’est restée que 5 mois et 22 jours au gouvernement. Depuis que je milite, j’ai rencontré trois à quatre ministres et à chaque fois j’ai le sentiment de faire « tourner manège » pour faire entendre les dysfonctionnements auxquels les victimes font face.

Avez-vous de nouveaux projets avec notre département ?


Bien évidemment, je prévois de venir prochainement dans le Jura pour présenter mon livre. Je dois aussi intervenir dans un lycée à Gray ainsi qu’à l’école de police de Montbélliard. Je reste ouverte à toutes propositions dans le Jura.