Éditorial

Réapprendre à apprendre

0
1041

La Cour des Comptes vient de publier une note dévoilant son analyse du système éducatif français. Un magnifique cadeau de Noël pour tous ceux qui, de près ou de loin, contribuent à œuvrer quotidiennement à ces missions aussi ingrates que difficiles.
Nous serions donc soumis à un « système aux performances médiocres » malgré un effort budgétaire et de nombreuses réformes, estiment les Sages de la rue Cambon, lesquels invitent à réorganiser “plus efficacement” l’école au service des élèves.
« En dépit d’une dépense nationale d’éducation supérieure à la moyenne de l’OCDE, la performance du système scolaire français tend à se dégrader, en particulier pour les jeunes issus des milieux défavorisés » détaille la publication.
« Les réformes pédagogiques, l’accroissement des moyens, les résultats des évaluations sur les acquis des élèves n’ont pas encore suffisamment permis d’améliorer la qualité du système éducatif français ».
Or, si la conjoncture épouse la même trajectoire (technocratique) que celle insufflée depuis des décennies, il est à craindre qu’il faille attendre encore longtemps, avant de s’extirper de cette insuffisance généralisée. Et ce, à tous les étages.
C’est à se demander si les auteurs de ces observations vivent sur la même planète que nous lorsqu’ils évoquent « l’accroissement des moyens ». Sans doute serait-il souhaitable de les emmener constater sur place, l’ensemble des conséquentes problématiques liées au nombreux postes vacants, manquants, non remplacés. Qu’il s’agisse de psychologues, d’infirmiers, de conseillers principaux d’éducation ou tout simplement d’enseignants.
S’ils le souhaitent, je connais personnellement d’excellents exemples locaux…
Comment agiraient-ils face à un élève ne pouvant convenablement terminer ses devoirs car ses parents (quand il en a la chance d’en avoir deux), ne peuvent plus payer leur fournisseur d’accès à internet et viennent de se le faire couper ? Quoi lui répondre ? Comment avancer dans et vers le bon sens ?
Par ailleurs, la juridiction financière de l’ordre administratif observe que l’adaptation des dépenses à l’évolution de la démographie est “trop lente”, alors que notre pays a consacré en 2020 près de 110 milliards d’euros à l’éducation des élèves du premier et second degré ! Elle regrette aussi les réformes pédagogiques décidées par les gouvernements successifs, qui « ne suffisent pas à améliorer la performance ».
Puis conclut en estimant que la France dispose d’un système scolaire « à la gestion trop centralisée et encadrée ». C’est peu de le dire ! Accordé comme il se doit, l’adjectif sclérosé, cadenassé ou étriqué eût été vraisemblablement mieux approprié…
D’autres phrases sont tout aussi étonnantes. Comme « Le gouvernement refuse de voir la ségrégation scolaire », ou encore « L’amélioration de la performance et de l’équité du système scolaire exige une capacité d’adaptation plus forte aux contextes locaux et aux profils des élèves ». Non, sans blague ?
Comme pour bon nombre de services publics, il serait vraisemblablement plus judicieux de débureaucratiser le millefeuille administratif qui les compose, de remettre sur le terrain davantage d’effectifs. Bref, d’oser « quoi qu’il en coûte », apporter enfin les bonnes solutions aux vrais problèmes que l’on n’ose pas nommer ou que l’on se refuse à voir, car ils viennent bousculer une idéologie conventionnelle…
Alors peut-être, malgré les nouvelles complexités de notre époque auxquelles ils doivent faire face, nos jeunes parviendraient mieux à se construire, et trouveraient plus facilement leur place, dans les sables mouvants de l’inquiétante spirale déliquescente qu’ils subissent.
L’espérance en l’avenir est à ce prix.
Le bal des hypocrites touche à sa fin. D’une manière ou d’une autre, très prochainement, il faudra rendre des comptes, réparer les dégâts et passer à la caisse…
Bon courage et joyeux Noël !