Père Noël, votre nom n’est-il pas devenu trop lourd à porter en cette période de déconstruction générale des différents rites occidentaux, et notamment chrétiens ?
Oh vous savez, j’en ai vu d’autres. Depuis la nuit des temps, l’humanité s’est déchirée à mon sujet…
Pour certains, Noël renvoie au jour de la Nativité, c’est-à-dire au jour de la naissance de Jésus. Je suis donc, de fait, rattaché à une fête chrétienne.
Pour d’autres, je ne suis que l’incarnation d’une fête païenne associée au solstice d’hiver : les Saturnales. Un moment de grandes réjouissances populaires où dans la Rome antique, les barrières sociales disparaissaient : on organisait des repas, on échangeait des cadeaux, on offrait des figurines aux enfants et on plaçait des plantes vertes dans les maisons, notamment du houx, du gui et du lierre.
À partir de 274 (vous voyez tout cela ne date pas d’hier !), les Saturnales ont été prolongées le 25 décembre par le Dies Natalis Solis Invicti « le jour de naissance de Sol Invictus » où l’on célébrait le retour du Soleil, le rallongement du jour.
Certains exégètes juifs et chrétiens ont écrit que les fêtes de Hanoucca et de la Nativité avaient été créées pour contrebalancer les fêtes du « Soleil invaincu ».
Tout cela est tellement confus, tellement contradictoire parfois, que je m’en voudrais d’afficher une image trop clivante pour vos lecteurs.
Et puis, vous savez, l’essentiel n’est pas là. Ce qui compte le plus à mon sens, c’est d’apprécier le moment présent. De savourer de se sentir vivant, d’exister ici et maintenant.
Qu’importe où, comment, pourquoi et avec qui…
Deviendriez-vous plus philosophe avec les années ?
J’ai la chance de ne travailler qu’une nuit par an. Ce qui me laisse 364 jours pour observer et réfléchir. Naturellement, cela me permet d’aiguiser mon regard sur l’évolution des choses, de me questionner sur la marche du monde, de prendre davantage de recul quant à certaines turpitudes frappant le genre humain. Y compris les miennes.
Selon vous, pourquoi et comment a-t-on pu en arriver là ?
Je ne vous apprend pas que pour une majorité de gens, tellement abîmés depuis près de deux ans, rien ne sera plus jamais comme avant…
Par ailleurs, d’autres bouleversements sociétaux, sociaux ou politiques sont venus se greffer sur les angoisses existentielles des plus modestes et/ou des plus fragiles. En tout cas, des âmes les plus sensibles, les plus exigeantes. Selon moi, les plus intéressantes !
Il faudra du temps pour que la résilience puisse opérer. Beaucoup de temps pour que le bon sens parvienne à gommer les antagonismes des « clans » ou des « minorités ». Mais, pour avoir vu depuis des siècles, des crises bien plus dramatiques se résoudre, je reste persuadé que toute personne peut devenir meilleure. Or, en contribuant à son amélioration, chaque individu contribue aussi à l’amélioration de l’Humanité… Si chacun y met un peu du sien, tout est possible. Surtout d’avancer vers le mieux.
Un dernier mot sur votre actualité professionnelle. Quels sont les jouets les plus prisés en ce Noël 2021 ?
Je note cette année une forte appétence pour les jeux écoresponsables, (fabriqués en France, pour vous Français), via des matériaux recyclables.
Également, pour les jouets ludo-éducatifs. Les jeux de société et autres jouets connectés ou interactifs figurent aussi en bonne place sur les millions de lettres que je reçois chaque jour. Nouveauté notoire, les jeux « Kidultes », c’est-à-dire destinés à la fois aux parents et aux enfants. Une manière habile de faire d’une pierre deux coups.
On me souffle dans l’oreillette une question quelque peu indiscrète… Je ne peux résister à vous la poser. La mère Noël existe-t-elle réellement ? Ressemble-t-elle à l’image de cette jolie et souriante femme en robe rouge que l’on voit parfois ?
Je vous vois venir avec vos allusions orientées… Noël reste avant tout la fête des enfants. Ce n’est donc pas le bon moment !
Si vous voulez en savoir plus, revenez pour le réveillon du nouvel an…