Après avoir été reportée pour cause de pandémie de Covid-19 depuis plus de deux ans, l’épineuse question de la réforme des retraites est à nouveau à l’ordre du jour de notre actualité. Emmanuel Macron l’a affirmé sans complexe : il veut relancer la mesure, et vite, confirmant l’objectif d’une entrée en vigueur de ladite réforme à l’été 2023.
C’est pourquoi le gouvernement vient, la semaine dernière, d’être destinataire d’un « avis du comité de suivi des retraites, chargé de faire des propositions pour garantir l’équilibre du système de retraites », a déclaré Olivier Dussopt, le ministre du Travail.
Lequel insiste : « Nous devons travailler plus. Cela veut dire être plus nombreux à travailler ». Une remarquable nuance sémantique qui en dit long sur les intentions et les recommandations provenant de sa hiérarchie directe…
Le problème (ou plutôt la solution), c’est qu’au regard du dernier rapport annuel du Conseil d’orientation des retraites (COR), notre système de cotisations a dégagé un excédent de 900 millions d’euros l’an dernier. En 2022, un surplus de 3,2 milliards d’euros est même attendu ! Tiens donc, finalement notre bonne vieille retraite par répartition “Made in France” serait viable ? Alors pourquoi changer une équipe qui gagne ?
D’autant plus que ce projet de réforme ne recueille l’adhésion ni des partenaires sociaux, ni des Français qui, en définitive, dans leur immense majorité, resteront toujours les dindons de cette mauvaise farce.
D’ailleurs, s’attaquer aussi farouchement à un pan entier de notre système social risque probablement de catalyser la grogne, d’embraser la rue, et de faire basculer l’opinion publique de la désapprobation à l’insurrection, pour ne pas dire davantage…
Or cela, notre cher pouvoir le sait parfaitement, et le craint d’autant plus depuis qu’il a eu à affronter son pire cauchemar il y a quatre ans : la crise des gilets jaunes.
Factuellement, selon le baromètre 2022 de l’Épargne en France et en régions réalisée par l’Ifop pour Altaprofits, pour près de trois quarts des sondés, l’âge idéal de départ à la retraite est à 62 ans ou moins.
La proportion de Français favorables à un départ plus tardif est de 21%. Parmi eux, dans le détail, 6% sont pour qu’ils soit à 63 ans, 4% à 64 ans, 8% à 65 ans et 3% à plus de 65 ans. Certains ont du tomber sur la tête.
J’aimerais d’ailleurs beaucoup convier ces derniers à un « atelier de lucidité ». Par exemple, à venir œuvrer, après 60 ans, sur un chantier de maçonnerie, à exercer des tâches physiques et pénibles tout en devant subir la pluie, le bruit, la poussière, les températures extérieures toute l’année. Ou à endosser la vie d’un agriculteur (365 jours de travail par an), ou encore d’enchainer les rotations de travail de matin, d’après-midi, et surtout de nuit, tellement insupportables et nuisibles à notre organisme… Avec les maladies que cela provoque (et coûte à notre système de santé).
Vraisemblablement modifieraient-ils leur perception et feraient-ils alors preuve de davantage de mansuétude et de discernement dans leur jugement péremptoire.
Reste cependant à savoir comment le gouvernement (qui rappelons-le, ne dispose pas de majorité absolue à l’Assemblée nationale), compte faire adopter cette réforme tant décriée. Même le parti présidentiel, récemment rebaptisé Renaissance, est divisé sur la question. C’est dire !
Enfin, s’il s’agit juste de rééquilibrer les comptes, il suffit d’aller chercher l’argent là où il est. A commencer par récupérer les 80 milliards de fraude fiscale des grandes multinationales qui nous échappent chaque année…