Rubrique. Grands Mots Grands Remèdes : Septième ciel

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Docteur Gérard Bouvier
Docteur Gérard Bouvier

Les vacances approchent… Comme tous les ans elles auront été bien méritées puisque notre mémoire nous laisse croire que chaque année qui passe nous aura été plus difficile à subir que la précédente. Qui déjà n‘était pas piquée des vers (1).

À l’heure où tout va mal, je vous souhaite des vacances où les vertiges du bonheur s’entrelacent avec les effluves d’une allégresse saupoudrée d’euphorie. Sans oublier deux doigts de béatitude. Et aussi un chouia de nirvana.

De belles rencontres aussi et pourquoi pas le septième ciel puisque -bien au frais derrière mon clavier- c’est moi qui régale et que ça ne mange pas de pain (2).

Aujourd’hui le septième ciel est à la portée de tous. Quitte à régler en trois fois sans frais. Il faut en profiter car ce ne fut pas toujours le cas. Il y a bien longtemps le bonheur total vous menait au troisième ciel (3). Non pas par ces mesquineries qui avaient cours naguère, ni même par un laisser-aller d’ascensoriste un peu feignasse mais par une méconnaissance de l’astronomie et des strates qui nous surplombent.

Ainsi Saint-Paul selon le Nouveau Testament, 2 Corinthiens 12 :2-4, fût-il expédié, lors d’une extase mystique, au troisième ciel (4). Ça n’était déjà pas la porte à côté mais aujourd’hui grâce à l’essor des télescopes on sait que le ciel a beaucoup plus d’étages que nous pensions et il est devenu assez commun de se retrouver au septième ciel. Sans qu’il soit nécessaire que j’entre plus avant dans le détails des quarts d’heure préliminaires parfois nécessaires.

Le septième, c’est là que sont Dieu et les meilleurs parmi les Anges. Vaut le détour.
Et un grand merci à la chrétienté d’avoir fait le ménage car chez les antiques le septième ciel était celui de Saturne qui mangeaient ses enfants nouveau-né pour déjouer la prophétie qui prétendait qu’un de ses enfants prendrait un jour sa place en Olympe (5).

Notes pour se faire une idée plus précise :

(1)- « Pas piqué des vers » est une locution qu’on trouve chez Balzac en 1837. Pour un meuble c’est le signe d’une bonne conservation à l’abri des vers à bois, des mites et des termites xylophages et responsables de mini trous en surface. L’expression a trouvé son public et s’est vite étendue bien loin des armoires et des poutres.
Aujourd’hui on trouve, derrière les fagots, des bouteilles pas piquées des vers. C’est un exemple.
Plus tôt dans l’histoire, dès 1821, on trouvait « pas piqué des hannetons ». C’était avant que de nouvelles pratiques agricoles raréfient la présence de ce coléoptère dont les larves souterraines sont ravageuses au point que le hanneton… fut excommunié par l’Église au Moyen-âge ! J’ignore s’il fut réhabilité depuis comme le fut par exemple Galilée… en 1992.

(2)- Aujourd’hui, le pain se vend comme des petits pains. Et pour une bouchée de pain. Mais jadis il y avait du pain sur la planche pour qui voulait gagner son pain . Et les journées étaient longues comme un jour sans pain pour ceux qui avaient mangé leur pain blanc en premier ou qui ne mangeaient pas de ce pain-là et se retrouvaient au pain sec et à l’eau. Et c’était pire pour ceux à qui l’on avait fait perdre le goût du pain…

(3)- Dans l’astronomie médiévale, où la Terre était pour quelques années encore au centre de l’Univers, le premier ciel était la Lune, le deuxième Mercure, le troisième Vénus, le quatrième le Soleil, etc.

Vénus qui règne en maitresse sur le troisième ciel est la déesse de l’amour, de la séduction et de la beauté féminine. C’est donc une escale rafraichissante entre Mercure, dieu des canicules et le Soleil qui ne vaut guère mieux.

(4)- Dans les textes du Nouveau Testament, Saint Paul rapporte une expérience spirituelle mystérieuse. « Je connais un homme en Christ, qui, il y a quatorze ans, fut enlevé jusqu’au troisième ciel. Était-ce dans son corps ou hors de son corps, je ne sais, Dieu le sait. » Savoir que deux millénaires plus tard le troisième ciel est devenu le quatrième sous-sol du septième ciel laisse songeur.

(5)- Les anglais qui n’en ratent pas une ont marqué avec leur Saturday, samedi jour de Saturne, leur vénération pour ce dieu. Était-ce mérité ?

Saturne était un Titan, fils du Ciel et de la Terre. Les turfistes auraient dit qu’il était bien né s’il eut été un cheval. Mais c’était un Titan. Il avait épousé sa propre sœur
Ops. C’était bien avant l’invention de la notion d’inceste et je ne sais s’il vient de là qu’on écrit « oups » quand un texte dérape.

Il est beaucoup pardonné à Saturne du fait qu’il fut le père de Jupiter, de Neptune et de Pluton. Tout le monde ne peut pas en dire autant.

Chez nous le samedi est le jour du sabbat ce qui correspond mieux à notre état d’esprit qui rechigne à honorer un dieu qui mangeait ses enfants de peur qu’un d’eux ne le détrône.