Antorpe et Saint-Vit. Cinquantenaire de la fusion entre les deux communes

Voilà déjà un demi-siècle que les communes d’Antorpe, alors jurassienne, et de Saint-Vit ont fusionné, sous le régime de la fusion-association, laissant à Antorpe son existence propre en tant que commune associée.

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Pascal Routhier et Dominique Nicolin
Pascal Routhier et Dominique Nicolin

C’est une commune qui conserve son Maire, appelé maire délégué, et quelques spécificités comme les bases d’imposition du Jura. Sorte de privilège historique puisqu’Antorpe a été une commune du département du Jura, jusqu’en 1974.
Au XIXe et XXe siècle, Antorpe vit comme tous les villages environnants, avec l’incidence des guerres et la particularité d’être sous la double dépendance du département du Jura et des communes voisines (administrations, collège de Fraisans, syndicats divers) et de sa voisine Saint-Vit dans le Doubs.
Il lui faut cependant se moderniser : l’eau est un problème, elle provient essentiellement de citernes avec récupération de l’eau de pluie par les toits, cela ne suffit plus. Il faudra attendre l’arrivée de la fée électricité et la construction du château d’eau d’Evans, pour réaliser l’installation du réseau intercommunal d’eau courante, vers 1920.
Sans être liées administrativement, les deux communes Saint-Vit et Antorpe vivaient en bon voisinage, elles avaient déjà passé des accords par exemple pour le cimetière et la paroisse (Antorpe n’a pas d’église), et leur proximité avait créé de nombreux liens entre les habitants.
« Au début, Antorpe conservera un régime électoral particulier, avec une représentation dans le nouveau conseil municipal par 4 ou 5 conseillers qui élisent un « Maire délégué ». Les modifications des lois électorales amèneront la suppression de cette particularité : le conseil municipal est élu à la proportionnelle et le « maire délégué d’Antorpe » est élu par le conseil municipal. Une partie des avantages existant avant la fusion restent acquis, notamment les bases d’imposition qui restent celles du Jura », indique en substance Pascal Routhier le maire de Saint-Vit.

« La campagne à la ville »

Dominique Nicolin, maire délégué d’Antorpe précise pour sa part :
« Le basculement a aujourd’hui 50 ans. Seuls les plus anciens se rappellent de ce moment-là. Comment une petite commune d’une centaine d’habitants à l’époque devient aujourd’hui le pôle de développement de la commune de Saint-Vit ?
Géographiquement aux limites au Sud (plaine inondable), à l’Ouest (le Jura), et à l’Est (alternance de zones vertes et industrielles), il devenait nécessaire pour Saint-Vit de s’orienter au Nord côté Antorpe pour que notre commune réponde à la demande de logements et ainsi permettre à celle-ci de continuer à se développer. Le dynamisme de la ville est reconnu de tous, par sa multitude d’associations sportives et culturelles ainsi que pour son rôle de bourg centre commercial et de services. La population d’Antorpe atteint maintenant presque 900 habitants. Et cela devrait croître encore. Mais c’est surtout également la campagne à la ville et le cadre de vie est des plus agréables. Le destin d’Antorpe est donc irrémédiablement lié à celui de Saint-Vit, et surtout tourné vers l’avenir ! »

 

Du Jura au Doubs, la vision de Michel Vautrot

 

Michel Vautrot entouré de ses glorieux souvenirs.

 

Michel Vautrot, le célèbre arbitre international promu Chevalier de la Légion d’Honneur pour son action dans le sport, est un enfant d’Antorpe. Il nous ouvre sa boîte à souvenirs, entouré ses innombrables trophées et/ou distinctions.

Une enfance à Antorpe

Ayant passé sa jeunesse à Antorpe, Michel Vautrot relate : « Lorsque j’ai ouvert les yeux le 23 octobre 1945 dans la maison familiale de mes grands-parents maternels, Antorpe comptait moins de 100 habitants et était estampillée « Jura », même si nous dépendions de Saint-Vit pour l’église, le cimetière et l’État Civil. Mystérieux découpage géographique puisque la route départementale de Saint-Vit à Berthelange et au-delà, serpentait sur quelques hectomètres seulement jurassiens. Dans un souci aussi pratique qu’économique les deux départements s’étaient mis d’accord pour que la DDE 25 gère cette portion, d’où les panneaux d’époque en béton « ANTORPE – Doubs »…

Les premiers coups de sifflet

Et l’homme en noir poursuit : « C’est donc là, que j’ai donné mes premiers coups de sifflet, presque entre deux biberons, c’est là que j’ai grandi avec les valeurs terriennes transmises par mes parents et grands-parents, c’est à Antorpe que j’ai appris la sagesse rurale, loin des artifices et des paillettes citadines… Longtemps maire, mon grand-père Maurice Gruet (Gilbert Dugourd, son successeur a été le dernier maire de l’ère jurassienne) brossait sa moustache gauloise et mettait ses habits du dimanche pour une réunion à Dampierre (Canton), Dole (Sous-Préfecture), Lons-le-Saunier (Préfecture) ou à Saint-Vit (pour une manifestation patriotique).
Les « huiles » de l’époque défilaient à la maison en étant condamnées à boire la piquette du patron, car il y avait des vignes sur la route d’Evans : les gendarmes de Fraisans, le Conseiller Général, le Député, le Ministre dolois Jacques Duhamel, et, cerise sur le gâteau, le Président Edgar Faure qui était la personnalité nationale de notre Franche-Comté. C’est lui qui a remis à notre « papy » Maurice la Légion d’Honneur, sous le noyer au bord de la route à côté de la Mairie/École » .

« Un temps que les moins de 60 ans ne peuvent pas connaître… »

« L’instituteur, Gaston Morel, fameux « hussard de la République » faisait classe unique avec une réussite qui en disait long sur ses compétences. Les Docteurs Vaissier (Saint-Vit) et Diacre (Fraisans) se partageaient la patientèle quels que soient le jour et l’heure. Ma grand-mère Madeleine était appelée bien que sans diplôme ni formation et encore moins de rémunération, pour piquer les fesses qui en avaient besoin. En rentrant elle faisait bouillir l‘unique seringue sans imaginer une seule seconde qu’aujourd’hui elle irait directement en prison ! A cette époque, les anciens échangeaient encore en patois…
Après les moissons, la batteuse du « P’tit Louis d’Evans » arrivait avec son matériel d’une longueur impressionnante, plusieurs remorques attachées les unes aux autres. La solidarité des cultivateurs jouait à plein pour l’opération poussiéreuse : séparer le grain de la paille.
Voilà ce qu’était « Mon Antorpe » que les moins de 60 ans ne peuvent pas connaître…»