Dans cette fresque familiale au cœur du Venezuela, Miguel Bonnefoy nous offre un voyage poétique et flamboyant. Le Rêve du jaguar est lauréat du grand prix du roman de l’Académie française 2024. Éditions Rivages.
Miguel Bonnefoy à défaut d’être écrivain aurait pu être conteur. Une verve intarissable, une énergie débordante et communicative, jonglant avec élégance et délicatesse entre différentes langues. Il y a chez cet homme de la hauteur et chez l’écrivain un indéniable talent et une volonté d’embrasser la littérature avec tous ses sens. Et de cela, on se réjouit.
Je me souviens de ce rêve du jaguar, appris il y a longtemps, de ce poème de Leconte de Lisle. Miguel en a fait le titre de son nouveau roman et il serait intéressant de lui poser la question de cet écho. Mais revenons-en à notre rêve du jaguar version 2024, qui semble dire à l’instar de Pessoa « que la littérature est la preuve que la vie ne suffit pas ».
Ce roman est une odyssée foisonnante qui nous embarque au cœur d’un exotisme tant géographique qu’humain porté par une narration vive et enlevée. Dès la première phrase, il est impossible de lâcher la main du narrateur qui nous mène avec talent dans ce voyage au cœur de l’histoire familiale sur les terres vénézuéliennes avec pour ambition de s’attaquer aux racines de la branche maternelle. Trois générations se succèdent pleines de fougue et d’espérances au milieu d’un pays qui tentera à coup de révolutions de trouver sa direction.
On croisera un enfant abandonné sur les marches d’une église, une jeune femme prête à tout pour embrasser la cause féministe, une autre qui ne cessera de parcourir le monde pour tenter d’y trouver des réponses et enfin un écrivain qui n’aura pas d’autre choix pour trouver ses mots que de sonder ses racines. Il y aura de l’amour, du désir et des rêves, de l’exotisme, avec cette volonté toujours d’aller presque au-delà du réel, pour donner à la vie la poésie nécessaire à cultiver l’espérance.
C’est certainement cela qui fait l’étoffe de ces héros, de rêver grand et de ne pas dévier de ce qui les appelle profondément. Tout cela Miguel le traduit avec talent, puisant ses forces dans un style conquérant et paré de panache. Et dans ces mots en signe d’éternité, l’auteur nous entraîne au cœur de la vie dans ce qu’elle a de plus intense et de plus fondateur.
Isa sur Insta : lodyssee_des_mots